vendredi 4 février 2011

Homélie oecuménique

Homélie pour la semaine de l’unité des chrétiens 2011

« Moi j’appartiens à Pierre ». On pourrait dire les catholiques.
« Moi j’appartiens à Paul ». On pourrait dire les protestants.
« Moi j’appartiens à Apollos ». On pourrait dire les orthodoxes.
Dans un premier temps, cette description de la communauté de Corinthe pourrait nous rassurer. Vous voyez, déjà dans l’Eglise apostolique, au temps de saint Paul, il y avait des divisions entre chrétiens. Rien de nouveau sous le soleil de l’Eglise. Il ne faut pas rêver : de telles désunions, il y en aura sûrement toujours. Il faut faire avec…un point c’est tout.

Seulement Paul ne l’entend pas de cette oreille. Il écrit des paroles fortes, et c’est « au nom de notre Seigneur Jésus Christ. »
- Qu’il n’y ait pas de divisons entre vous !
- Cette question : le Christ est-il donc divisé ?
Et l’apôtre de jeter tout son prestige dans la balance :
- Est-ce Paul qui a été crucifié pour vous ?
- Est-ce au nom de Paul que vous avez été baptisés ?

Ces mêmes constatations et ces mêmes interpellations retentissent encore aujourd’hui.
Un test ! Si quelqu’un nous demande de quelle religion nous sommes, nous répondons spontanément : Je suis catholique… je suis protestant…je suis orthodoxe, ou encore autrement.
Pourquoi ne disons-nous pas d’abord, comme le demande saint Paul : « J’appartiens au Christ » …je suis chrétien ?
Bien sûr, il faut le reconnaître et l’accepter : nous avons tous de bonnes raisons -à côté de moins bonnes aussi- de nous situer d’abord dans une Eglise confessionnelle, la nôtre par exemple, la catholique.
Mais pourquoi ne pas exprimer d’abord notre point commun, ce qui nous unit déjà et nous pousse à nous réunir encore davantage : la communion au Christ, le christianisme ?
C’est vrai : c’est dans et par notre Eglise – la catholique pour nous- que nous avons appris à connaître l’Evangile, à aimer le Christ, à vivre avec d’autres frères et sœurs, ce qu’on appelle une communauté chrétienne.
Mais comment ne pas reconnaître aussitôt que ce Christ rencontré là déborde les contours et parfois les barrières de ma propre Eglise, qu’il est aussi le Christ des autres et que personne ne peut le confisquer rien que pour soi.

L’œcuménisme, c’est comme un puzzle en voie de reconstitution. En nous divisant, nous sommes partis en emportant des morceaux du puzzle, et les miens manquent aux autres, et ceux des autres me manquent. Je veux dire leurs différences qui pourraient devenir un cadeau quand nous pourrons à nouveau les apprécier si nous nous rapprochons davantage. Jean-Paul II a défini l’œcuménisme comme « un échange de cadeaux ».
Chaque Eglise a beaucoup à donner et autant à recevoir, pour redessiner, peu à peu, à la face du monde qui nous attend au contour, non pas nos caricatures confessionnelles, mais l’image du Christ lui-même, son visage communautaire.

Car l’enjeu de l’œcuménisme, ce n’est pas la victoire d’une Eglise sur les autres, mais la visibilité de Jésus à la face de l’humanité. Le Christ déjà l’avait pressenti, qui pria ainsi pour l’unité de ses disciples : « Père, que tous soient un afin que le monde croie. »
Je le sais : on ne peut pas en un temps bref effacer des siècles de divisions, parfois de haines et même de guerres dites « de religion ». Relever un tel défi est d’abord l’œuvre de l’Esprit qui seul, mais aussi avec nous, peut réparer ce que nous avons cassé ou du moins gravement abîmé.
La semaine de prière pour l’unité des chrétiens nous rappelle opportunément que cette œuvre appelée œcuménisme est absolument prioritaire dans l’actualité et le futur de nos Eglises. D’une façon ou d’une autre, tous les chrétiens peuvent et même doivent y contribuer.
Il y a la prière, bien sûr, mais il y a aussi la fréquentation commune de la Parole de Dieu, comme on l’a vécu par exemple chez nous lors de FestBible.
Et puis l’abandon des préjugés, de l’ignorance, et l’approfondissement des rencontres, des collaborations. En un mot : de la fraternité.
Face à une société toujours plus indifférente à la foi et à l’évangile, nous ne pouvons plus nous payer le luxe pervers de demeurer séparés.
Que se réalise enfin la prière de Jésus la veille de sa mort : « Qu’ils soient parfaitement un et que le monde sache que je les ai aimés comme tu m’as aimé. »

Claude Ducarroz

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