mercredi 17 octobre 2012

En hommage à + Soeur Denise-Marie

+Sœur Denise-Marie
En hommage et merci

Il y a trois manières de bien lire l’Evangile, et pourquoi ne pas choisir toutes les trois ?

La première consiste à plonger dans le texte sacré, avec un cœur ouvert par la prière, tout à l’écoute de l’Esprit qui anime la lettre et transfigure la vie.
La deuxième est une forme de contemplation, celle que nous pratiquons lorsque nous nous laissons toucher par les œuvres d’art qui nous racontent l’Evangile sur toutes les gammes de la beauté. Une fresque de Fra Angelico à Florence, la Pietà de Michel-Ange, le Requiem de Mozart et tant d’autres chefs-d’œuvre nous ramènent par l’émotion aux sources bibliques du salut.
Et puis il y a la fréquentation de certaines personnes qui incarnent, par ce qu’elles font et surtout ce qu’elles sont, telle ou telle page de la divine révélation.

Je n’hésite pas à le dire maintenant qu’elle n’est plus là pour protester : Sœur Denise-Marie était de ces témoins qui font voir l’Evangile en les regardant vivre, tout simplement.
Durant 15 ans, dans cette paroisse et au-delà, j’ai médité souvent la Bonne Nouvelle de l’amour de Dieu en observant, souvent admiratif, parfois inquiet, les faits et gestes de cette vraie « sœur de la charité ».
Quand je voulais l’agacer, tout en m’amusant un peu, je luis disais qu’elle était  la « Mère Teresa  du Valentin ». Elle protestait. Mais quand on lui demandait ce qui la faisait agir, courir, s’indigner, remettre en question, déranger en interrogeant la conscience, forcer à l’engagement au service des plus pauvres, elle citait aussitôt, comme la sainte de Calcutta, cette phrase de l’Evangile de Matthieu : « Tout ce que vous faites -ou pas- à ces plus petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous le faites… ou pas. »
Tel était le fond de sa spiritualité, telle était la source vive de son action, telle était sa motivation la plus profonde.

Dès lors tout être humain, quels que soient son origine, sa culture, sa religion, et même ses défauts et ses astuces, était digne de son écoute, de son attention, de son secours. Il suffisait qu’il soit en manque de quelque chose –par exemple de dignité, de respect, de solidarité- pour que montent en elle la sainte colère d’une protestation et surtout la violente impatience d’une action, parfois solitaire, souvent partagée, car elle avait l’art de nous mettre au boulot avec elle quand la cause de la fraternité humaine et de la charité chrétienne était en jeu. Il y avait en Sœur Denise-Marie une redoutable contagion de l’amour traduit en imagination pour aider, secourir, relever, restaurer en humanité.

Elle aurait pu se contenter d’une compassion efficace à la manière d’une super « dame de charité ». Eh ! bien non ! Elle avait la charité intelligente et même perspicace. J’ai souvent été frappé par sa capacité d’analyse des  misères dans leurs causes sociales, économiques et politiques. Son cœur réagissait dans les urgences comme il se doit quand on est une fille de sainte Jeanne-Antide. Mais son esprit voyait plus large, dans les racines et dans les conséquences de ce qui fait souvent le malheur des pauvres gens.
Tout naturellement, sur ces terrains de la lutte quotidienne pour l’humanité de l’homme –de tous les hommes, et d’abord des plus fragiles et exclus-, elle se trouvait en fraternelle compagnie avec celles et ceux qui avaient au cœur la même passion de servir et de libérer. Ils avaient souvent d’autres références philosophiques ou religieuses : peu importe. C’est la capacité d’investissement pour l’autre –pour les autres-  qui bâtissait entre tous, croyants ou non, une merveilleuse et efficace communion.
Car de cette femme à la fois fragile et forte émanait un rayonnement qui dépassait largement  les cercles de la religion et de l’Eglise. Par son exemple d’une extraordinaire générosité, elle nous forçait à être meilleurs, pas dans les discours toujours trop faciles, mais dans les actes et en vérité.

Bien sûr, elle avait aussi ses défauts, qui étaient le plus souvent le revers de ses précieuses qualités. On ne pouvait que lui pardonner d’être parfois trop bonne quand on sait que, dans ce bas monde et face à tant de misères, il faut être trop bon pour l’être assez.

Enfin je veux souligner combien sa vie religieuse, faite de méditation, de prière et d’eucharistie a constitué le cœur brûlant de son action. Sans ostentation, mais avec une fidélité basique qui m’a souvent édifié, elle misait sur cette communion avec le Christ pour mieux aimer ses frères et sœurs en humanité. Généralement en retard à la messe pour cause de rendez-vous imprévus ou urgents, elle quittait alors le Christ pour le Christ. Elle était donc toujours à l’heure de l’Amour. Maintenant elle le voit puisqu’elle est arrivée.
Sœur Denise-Marie : merci !

Claude Ducarroz

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