Homélie
Dimanche 8 octobre
2017
Mt 21,33-43
Un opéra italien. L’évangile de ce dimanche
contient tous les ingrédients pour faire un bon opéra italien. Jugez
plutôt : la jalousie, le complot, le sang, la vengeance. Tout y est. Mais Jésus lui-même nous met en garde :
c’est une parabole, autrement dit un récit qu’il faut interpréter, non pas à la
lettre, mais en y cherchant d’utiles leçons pour la vie. Et ici : la vie
selon et avec le Christ.
Qui sont les auditeurs concernés et que faut-il retenir ?
Jésus s’adresse
d’abord aux grands prêtres et aux anciens du peuple, autrement dit à ses
auditeurs immédiats, sur le parvis du temple de Jérusalem. Discrètement –mais
ils le comprennent très bien-, le Christ leur rappelle les aléas de l’histoire
d’Israël, quand la patiente fidélité de Dieu s’est souvent heurtée aux
infidélités du peuple, notamment quand les prophètes/serviteurs ont été en
butte non seulement à l’incompréhension, mais aussi à la persécution, jusqu’à
la mort. Et maintenant que le Fils lui-même est à l’œuvre, voici que le même
sort l’attend, et pire encore.
La passion et la croix
pointent à l’horizon. Jésus adresse aux responsables d’Israël une sorte de
dernier avertissement, dramatique. Car la pierre qu’ils vont rejeter deviendra
la pierre d’angle, une merveille aux yeux de tous. C’est une allusion au
mystère pascal.
En fait, les
évènements se sont déroulés comme le Seigneur l’avait prévu. Les chefs du
peuple élu ont, dans leur grande majorité, refusé le Messie, Jésus de Nazareth.
Et après la Pentecôte, ce sont les païens, plutôt que les juifs, qui ont suivi
le Christ et embrassé l’évangile, en vertu de la promesse : Le Maître du domaine louera la vigne à
d’autres vignerons.
Dans les communautés
chrétiennes pour lesquelles l’évangéliste Matthieu écrit cet évangile, les
tensions ne manquaient pas, justement entre croyants issus du monde juif et les
convertis venus du monde païen. Il
fallait leur expliquer -aux uns et aux autres- que tous les chrétiens sont
désormais à égalité devant la grâce du salut obtenu par le Christ mort et
ressuscité.
Les privilèges
d’Israël sont passés maintenant dans une Eglise –le nouvel Israël- qui ouvre
largement les portes de la foi à toute personne de bonne volonté, qu’elle soit
d’origine juive ou de culture païenne.
Il y a dans cet
évangile l’image et le symbole d’une Eglise vraiment catholique, universelle,
pourvu que tous ses membres, avec la grâce de Dieu, donnent des fruits de foi,
d’espérance et surtout d’amour.
Et nous, me
direz-vous, où sommes-nous dans cette parabole, nous qui l’entendons dans la
liturgie par le service de l’Eglise d’aujourd’hui ? Car ne croyons pas que
nous ne sommes pas impliqués –on dit aujourd’hui « impactés » - dans
ce que Jésus a raconté au titre de cette parabole.
Nous faisons partie de
ces « autres vignerons » auxquels le Seigneur à remis sa vigne en
faisant de nous des héritiers des trésors qu’il a laissés après lui et pour
tous les hommes de tous les temps.
Il s’agit du royaume
de Dieu destiné à produire ici-bas déjà toutes sortes de beaux et bons fruits,
en attendant la pleine vendange dans le ciel.
Toutes les variétés humaines doivent pouvoir éclore, fleurir et donner
des fruits d’évangile en Eglise et dans notre monde. A condition, bien sûr,
comme le dira Jésus plus tard, que les sarments restent en communion avec le
cep.
C’est le sens de notre
rassemblement ce matin : écouter à nouveau la parole de Dieu, lumière sur
notre route, communier à la nourriture spirituelle qu’est l’eucharistie, nous
laisser dynamiser par l’Esprit Saint,
qui souffle où il veut.
Et ensuite porter des
fruits dans les vastes champs du monde, fruits de justice, de solidarité, de
paix, d’amour tous azimuts. Car l’Eglise ne doit pas devenir une forteresse
assiégée pour chrétiens frileux qui se seraient mis à l’abri derrière ses
murailles. Nous formons une communauté d’envoyés au large du monde et de l’histoire,
dans le souffle de la Pentecôte. Vous vous en souvenez : cet Esprit avait
fait sortir les apôtres apeurés d’un cénacle trop confortable pour les
propulser sur la place publique afin de témoigner pour le Christ et l’évangile
à la face de tous, dans la variété de leurs cultures.
Le pape François ne
cesse de nous rappeler cela, en parlant des périphéries de notre société vers
lesquelles il nous invite à aller, certes pas pour se dissoudre dans les modes
ou céder aux pressions des propagandes, mais pour offrir vaillamment l’évangile
toujours actuel, toujours neuf, à nos frères et sœurs en humanité, quels qu’ils
soient.
Que voilà un beau
programme de vie pour l’Eglise…que nous sommes tous, ne l’oublions pas.
Claude Ducarroz
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