Homélie
Ascension 2016
L’ascension !
Qu’est-ce que c’est que ça ?
En posant cette question au hasard dans la rue,
je devine les réponses.
L’ascension ?
* Un exploit sportif dans les montagnes. Les
alpinistes rêvent d’ascension, toujours plus haut.
* Peut-être la montée fulgurante d’une fusée à
l’assaut du ciel et d’une lointaine planète.
* Plus
prosaïquement, la réussite professionnelle d’un grimpion en quête d’un plus
grand pouvoir, de glorieux honneurs ou d’un meilleur salaire.
* On dit que ça peut même arriver dans l’Eglise,
mais je vous promets que les 5 nouveaux chanoines ne sont pas de cet acabit.
Tandis que les apôtres
regardaient Jésus, il s’éleva, et une nuée vint le soustraire à leurs
yeux : première version. Et la
deuxième : Puis Jésus, levant les
mains, bénit ses disciples, se sépara d’eux et il fut emporté au ciel.
Voilà l’ascension
selon Jésus de Nazareth.
Finalement, comment comprendre cela, au-delà
des images et des imaginations ? Avant d’entrer dans ce mystère, on
pourrait dire, en somme, qu’il s’agit de la mort d’un ressuscité, autrement dit
de la disparition de quelqu’un qui ne peut pas ou ne peut plus mourir.
Mais il faut mieux
explorer, si possible, le mystère dont il s’agit.
Pour Jésus le Christ, c’est d’abord le point
final ou plutôt le point d’orgue de sa mission. Tout est accompli. De la part
de Dieu, il est venu dans ce monde avec la libre collaboration d’une femme,
Marie de Nazareth. Il a passé en faisant le bien, et notamment à l’égard des
pauvres, des malades, des pécheurs, des exclus de toutes sortes. Il a annoncé
une bonne nouvelle à tous, à savoir l’assurance de l’amour de Dieu pour toute
l’humanité.
Dans la folie de cet amour, il a donné sa vie
pour nous sur la croix. Et il est ressuscité d’entre les morts -divine surprise-,
non pas pour se conférer à lui-même un certificat d’immortalité, mais pour
démontrer en lui notre destinée à tous : la vie éternelle au-delà de la
mort.
Tout est dit. L’ascension, c’est la finale, en
forme de feu d’artifice, de l’aventure du fils de Dieu sur notre terre. Il s’en
va, mission accomplie, pour retourner là d’où il était venu, dans la mystérieuse
communion trinitaire.
Dans cette ascension, il a donc encore quelque
chose à nous dire, et il nous la dit. Notre destinée, à l’image de la sienne,
dépasse les limites de ce monde. L’humanité de l’homme transcende les horizons
de sa vie ici-bas. Il y a en chacun de nous une graine d’éternité.
Tout homme, j’en suis sûr, à un moment ou
l’autre de son existence, a souhaité cela, pour lui ou pour ceux qu’il aime. Ce
peut être dans un instant de pleine tendresse, corps, coeur et âme. Ou dans
l’expérience d’une intense beauté, à voir, à entendre. S’impose alors le désir
d’une éternité de bonheur, si possible dans l’amour partagé.
Un désir fou, impossible à réaliser, à moins
qu’un autre, plus fort que nous, plus amoureux que nous, ne nous l’offre, gratuitement.
Voilà ce que Jésus nous redit dans son
ascension de ressuscité : là où je
suis désormais, vous serez aussi avec
moi. Vous avez raison de l’espérer et d’y croire, car j’ai implanté en vous
la racine du ciel, je vous ai programmés pour l’éternité de la joie, je vous précède seulement sur l’orbite du
royaume de Dieu.
C’est très bien, me direz-vous. Mais en
attendant il faut vivre, et pas dans les nuages : ici-bas, et c’est
parfois très bas.
Il y a le monde tel
qu’il est, plein de mauvaises surprises.
Il y a notre tragique histoire, faite
d’évènements de toutes les couleurs, y compris celles des catastrophes, des
violences et des deuils.
Il y a
surtout notre pauvre humanité, capable de quelques meilleurs et de beaucoup de
pires, comme nous le rappelle notre actualité.
Sans nier qu’il y ait quelqu’un qui nous
attende dans le ciel, les anges ont averti les apôtres : Pourquoi restez-vous là à regarder vers le
ciel ? Et ils retournèrent à Jérusalem avec grande joie. C’est que
Jésus leur avait fait une ultime promesse : Vous allez recevoir une force quand l’Esprit Saint viendra sur vous.
C’est maintenant cet Esprit qui prend le relai.
Il ne cesse de nous rappeler la parole et les actes de Jésus, que ce soit dans l’intimité de notre cœur priant, dans la
communauté de l’Eglise rassemblée ou dans les évènements du monde.
Cet Esprit nous aide à discerner le vrai, à
tenir bon dans l’espérance, à miser sur l’amour, à trouver les chemins de l’éternel
sur les sentiers, parfois très escarpés, sur lesquels nous marchons en pèlerins
d’humanité, toujours en quête de sens, pour notre vie et pour notre mort.
Le Christ de l’ascension ne nous laisse pas
seuls, encore moins abandonnés. Peut-être nous faut-il redéployer nos antennes,
justement en direction du ciel, pour mieux capter les signes que Jésus nous
adresse, mieux accueillir le courage que nous accorde son Esprit, rayonner davantage
de l’amour qu’il met dans notre cœur, et jusque dans nos mains, afin que cette
terre ait déjà, ne serait-ce qu’un peu, le goût du ciel qui nous est promis.
Alors l’ascension ne sera pas les derniers feux
avant la nuit, mais l’aurore d’un nouveau jour.
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