Homélie
Dédicace de la cathédrale
Trois fêtes en une ! Vous en avez donc
pour votre argent. Spirituel, évidemment.
En cette solennité de la dédicace de notre
cathédrale, nous pouvons puiser la grâce à trois niveaux de profondeur.
Il s’agit d’abord de ce sanctuaire, si cher à
notre cœur. Le 6 juin 1182, l’évêque de Lausanne Roger de Vico Pisano est venu
consacrer la première église construite au cœur de ce quartier du Bourg, au
dessus des falaises de la Sarine. Que les fondateurs de notre cité -les ducs de
Zaehringen- aient voulu aussitôt édifier une église en ce lieu, et déjà dédiée
à saint Nicolas de Myre : voilà qui atteste de leur foi, conformément au
psaume 127 : « Si le Seigneur ne bâtit la maison, en vain peinent les
bâtisseurs. Si le Seigneur ne garde la ville, en vain la garde veille. »
Depuis lors, notre ville a beaucoup grandi. Et
cette église aussi, puisque de 1283 à 1490, on a construit par dessus la petite
église romane des origines, cette grande église gothique qui fait aujourd’hui
notre fierté et suscite tant d’admiration. Comme il est important dès lors que
ce lieu sacré –véritable symbole de notre cité- soit bien entretenu, toujours
accueillant à celles et ceux qui viennent y chercher un espace de recueillement,
une découverte de beauté, une invitation à se tourner vers le Ciel. A l’instar
de ce que vivaient les juifs pieux dans le temple de Jérusalem dont parle le
prophète Ezéchiel.
Merci à tous ceux et celles qui s’engagent à
maintenir la qualité évangélique, esthétique et simplement humaine de notre
cathédrale. J’espère que bientôt les changements provoqués par l’ouverture du
pont de la Poya permettront d’améliorer encore l’ambiance et les offres dans et
autour de notre cathédrale.
Mais tout cela -si utile, si nécessaire- n’est
pas encore l’essentiel. Ce sanctuaire a été construit et a été peu à peu
embelli pour accueillir en priorité les croyants désireux de faire communauté
dans une vaste « maison de famille ». Une église, si belle qu’elle
soit, n’est pas un musée religieux. C’est d’abord un espace construit pour faciliter
le rassemblement des chrétiens qui veulent rendre gloire à Dieu, écouter
ensemble sa Parole, célébrer les sacrements, s’unir dans la prière et une vraie
fraternité.
La dédicace de l’église avec e minuscule, c’est
la fête de l’Eglise avec E majuscule. C’est notre fête. Nous commémorons en ce
jour la présence et l’action de tous ces chrétiens qui, tout au long des siècles, ont accueilli, vécu et
transmis les saints mystères célébrés ici. De sorte que, héritiers de toutes
ces traditions, nous puissions maintenant, à notre tour, recueillir et
prolonger cette magnifique histoire, sans doute tissée par des chrétiens
imparfaits –comme nous-, mais tenue et soutenue par tant de fidélités, de
conversions et finalement de sainteté.
Comme il nous faut réentendre le message de
l’apôtre Paul aux Corinthiens, alors qu’il n’y avait pas encore d’église de
pierre pour les rassembler : « Vous êtes la maison que Dieu
construit… Le temple de Dieu est sacré, et ce temple, c’est vous. » Finalement,
toutes les liturgies et toutes les pastorales, en leurs diverses initiatives,
nous rappellent cela. Aujourd’hui plus que jamais.
Fête de cette église. Fête de l’Eglise que nous
sommes. Fête aussi de l’Eglise universelle, car tout ici nous renvoie à plus
que nous, plus haut, plus loin. Nous sommes dans un lieu emblématique
d’horizons plus larges, qu’il nous faut prendre en compte. De paroissiale,
cette église est devenue collégiale en 1512. De collégiale, elle est devenue
cathédrale en 1924. Et aujourd’hui, par toutes sortes de mouvements qui
brassent la vie de l’Eglise et agitent la société, cette église devient
toujours plus un port qui rassemble, mais aussi un tremplin qui envoie au
large, aux périphéries, comme aime à le répéter notre pape François.
Les paroisses collaborent dans des unités
pastorales. Une cathédrale doit être particulièrement sensible au diocèse
puisqu’elle est la première église de l’évêque. Par ailleurs, cette cathédrale,
de par son histoire, est devenue « la maison du peuple » de Fribourg,
avec ses autorités, mais aussi ses invités et ses passants, parmi lesquels de
nombreux touristes de toutes nations, cultures et religions. Nous avons encore
des efforts à faire pour inscrire cela dans notre manière d’habiter et
d’accueillir en notre cathédrale.
Jésus, dans l’évangile n’a pas craint la manière
forte pour redonner au temple de Jérusalem sa vraie vocation parce que
« l’amour de la maison de Dieu faisait son tourment », comme il est
écrit.
Respect du passé et ouverture aux signes des
temps, fidélité essentielle et imagination réformiste peuvent aller de pair.
Mais aujourd’hui, soyons surtout dans la
joie ! Bonne fête à la cathédrale,
à nous l’Eglise ici et à l’Eglise universelle.
Claude
Ducarroz
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