César et/ou Dieu ?
« Rendez à César
ce qui est à César, et à Dieu ce qui est à Dieu ! »
Que de malentendus, que d’erreurs, que de
crimes même autour de cette petite phrase de l’évangile citée seulement
par Matthieu.
- Puisqu’il faut rendre à César ce qui est à
lui, les princes d’ici-bas ont-ils le droit d’exiger tout et n’importe quoi de
leurs sujets, y compris lorsqu’ils les nomment plus démocratiquement des « citoyens » ?
- Puisqu’il faut rendre à Dieu ce qui lui
appartient -autrement dit tout-, les pouvoirs religieux peuvent-ils user même
de la violence pour contraindre les hommes à accomplir leurs devoirs
sacrés ?
On a vu tout cela dans l’Histoire, et parfois
encore aujourd’hui. Les deux règnes antagonistes n’ont pas fini de se disputer
le cœur et la conscience des personnes.
Soyons justes : dans nos sociétés
européennes, de gros progrès ont été accomplis dans les relations entre César
et Dieu. Traduisons : entre l’Etat et les Eglises. Sous le slogan
« Une Eglise libre dans un Etat libre », on a cherché à mieux définir
les droits et devoirs des personnes qui appartiennent à la société de cette
terre tout en revendiquant un attachement à une religion qui pointe vers le
ciel.
Sans être parfaite, la démocratie pluraliste
assure au mieux un certain équilibre entre les allégeances. Les citoyens ont
des droits, mais aussi des devoirs, que les Eglises leur rappellent. Car on
n’est pas encore dans le Royaume de Dieu. Mais les croyants doivent pouvoir
jouir des libertés fondamentales qui leur permettent d’exprimer sans entrave leurs
convictions, en privé et en public, évidemment avec égard pour celles et ceux
qui ne pensent pas nécessairement comme eux. C’est à l’Etat de veiller sur le
respect de ces espaces de liberté.
Où en sommes-nous aujourd’hui chez
nous ? A la faveur d’un individualisme qui frise l’égoïsme, on en vient à
exiger surtout le respect des droits personnels sans estimer que nous avons
aussi des devoirs, y compris vis-à-vis de la communauté sociale et politique.
Les Eglises feraient bien aussi de répéter aux croyants –et aux autres en passant-
que tous doivent aussi rendre à César ce qui lui appartient afin que la vie
commune sur cette terre soit marquée non seulement par le primat des libertés
individuelles mais aussi par la nécessité des solidarités sociales. Y compris
par la justice salariale, le paiement des impôts et le secours dû aux plus
faibles.
Echange de bons procédés ! L’Etat se doit
de respecter les consciences de ses citoyens, notamment lorsqu’ils s’expriment à travers les
religions et Eglises, dans la mesure où le bien commun, défini
démocratiquement, est bien servi par leurs engagements au bénéfice de tous, à
commencer par les plus pauvres. Un supplément d’âme ne peut qu’être bienfaisant
pour toute la société. Les Eglises sont aussi là pour le proposer et le vivre.
Dans la liberté évidemment.
César ou Dieu ? Les deux, mais chacun à sa
place. Je ne vois pas en quoi les citoyens, même sans religion, auraient à
craindre celles et ceux qui estiment que Dieu doit être premier servi quand on
sait combien ce Dieu-là est ami des hommes. De tous.
Claude
Ducarroz
A paru sur le site
www.cath.ch
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