mardi 26 mars 2019

La main droite du pape

Blog La main droite du pape Regardez bien ces deux photos. Leur « face à face » m’a intrigué et surtout fait réfléchir. Sur le cliché de gauche, la main droite de Jean-Paul II admoneste vivement le Père Ernesto Cardenal –par ailleurs poète très connu- qui avait accepté d’être ministre de la culture dans le gouvernement sandiniste du Nicaragua. C’était le 5 mars 1983. Adepte de la théologie de la libération, il avait pensé se mettre, de cette façon, au service des plus pauvres et de leur émancipation. Deux ans plus tard, le même pape excluait ce religieux de tout ministère par une sanction canonique de suspension. Cardenal n’avait pas obéi à ses supérieurs. Sur le cliché de droite, le même pape et le Père Marie-Dominique Philippe se présentent en amis presque intimes. La main droite de Jean-Paul II -fait rare- a passé sur l’épaule du célèbre religieux. Ils sont tout sourire. Cardenal a-t-il toujours fait juste ? Probablement pas, et surtout Dieu seul le sait. Il est maintenant en fin de vie. Le pape François l’a relevé de toute sanction canonique. Il attend la mort en paix. Par ses poèmes et par son engagement social, il a bien servi l’Evangile des plus oubliés. Malgré tout. On sait maintenant ce qui se cachait dans l’esprit et sous la soutane blanche du Père Philippe. Mais sans doute le pape Jean-Paul II ne le savait-il pas. Tels sont les hoquets de l’Histoire, y compris celle de l’Eglise. Cette Histoire justement nous apprend à relativiser beaucoup de choses, y compris à propos du ministère des papes, si précieux soit-il. Je n’ai jamais été un fan du « santo subito ». Il faut donner du temps à l’Histoire, précisément pour lui permettre d’accomplir son œuvre de discernement et de critique. On assiste alors à des revirements qui peuvent étonner. La sainteté est un ruisseau discret qui irrigue personnes et communautés, avec bien des surprises quand ce qui fut longtemps caché finit par être révélé. Les tenants courageux de la préférence accordée aux plus pauvres n’ont pas toujours été en odeur de sainteté au Vatican. Plusieurs sont maintenant canonisés ou en passe de l’être. D’autres, qui fréquentaient joyeusement les palais apostoliques, squattent maintenant les limbes de la mauvaise réputation. Nous n’avons pas à distribuer les bons ou les mauvais points de la fidélité à l’Evangile. Mais il n’est pas sans signification, en nos temps troublés, que nous devions peut-être abaisser quelque peu les grandeurs de hiérarchie, même pontificales, pour disperser les superbes et élever les humbles. Il me semble qu’une petite servante de Nazareth avait déjà proclamé cela en son temps dans son cantique de louange. Claude Ducarroz A paru sur le site cath.ch

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