lundi 24 décembre 2012

Noël 212

Noël 2012




Joyeux Noël !

Pardon ! Vous parlez de quel Noël ? De quel Noël s’agit-il ?



Il y a celui qui a commencé déjà au début de novembre. On le nomme plutôt maintenant avec une certaine pudeur « les fêtes ». Alors, comme on dit : « Bonnes fêtes ». Avec des vitrines scintillantes, des propositions de réveillon bien gavé et bien arrosé, une débauche de consommation. Et quelques cadeaux évidemment, tantôt pour faire plaisir –et c’est très louable-, tantôt pour apaiser sa conscience, et c’est moins avouable.



Et puis à l’autre bout de la société, il y a ces Noëls dont j’entends dire : « Je n’aime pas ces fêtes. Vivement que ce soit passé ! » A cause des fatigues, à cause des solitudes, à cause des épreuves de santé, à cause des souvenirs pas toujours très festifs.



Et au milieu, entre deux, qu’est-ce qu’il y a ? Ce qu’on appelle « les fêtes de famille ». Quand on fait une enquête, les gens répondent surtout : « Noël, c’est une fête de famille ». Et c’est chaleureux. On s’aime davantage, on se rencontre plus. C’est beau !



Sauf qu’il ne faudrait pas oublier une certaine famille sans laquelle il n’y aurait jamais eu de Noël, ni il y a deux mille ans ni aujourd’hui. Oui, il y a bien une famille à l’origine de tout cela. Permettez-vous qu’elle se glisse discrètement entre le sapin illuminé, les cadeaux petits ou grands, les guirlandes et les menus de fêtes ? Et même au milieu des chants traditionnels, les vôtres.

Une famille. Plusieurs familles.

La première est éternelle. Donc toujours d’actualité. C’est la famille trinitaire, là où tout a commencé. Car Dieu est communion, parce qu’il est Amour, dans le bonheur du Père, du Fils et du Saint Esprit. Avec une précision importante : Dieu n’est pas du genre super-égoïste puisqu’il est justement Amour, il n’est que Amour. Il est amour à communiquer, à partager, à donner en cadeau, à se donner lui-même. En cadeau à nous, pour nous.



Et nous voilà à Bethléem, précisément pour Noël. Oui, « Dieu a tellement aimé le monde qu’il a envoyé son fils unique » en la personne de Jésus de Nazareth. Tout cela peut sembler fou à des esprits qui ne perçoivent pas jusqu’où peut aller l’amour quand c’est Dieu qui aime.

Aimer, n’est-ce pas rejoindre l’autre là où il est, si bas qu’il soit ? N’est-ce pas se mettre à la place de l’autre pour lui montrer et lui démontrer cet amour ? Y compris, s’il le faut, pour le sauver ?



C’est ce que Dieu a fait à travers une famille toute simple, car Dieu ne pouvait que prendre la dernière place pour relever les plus petits, les derniers, les exclus de toutes sortes. Et cette famille est là devant nous dans la prodigieuse imagerie de Noël sous toutes ses formes : une femme, « petite servante du Seigneur », un homme juste et droit, tout de travail, de silence, de prière et de dévouement, Joseph.

Et surtout le petit, le bébé, l’enfant : le fils de Marie et le fils de Dieu, la rencontre parfaite dans la fragilité de la chair, entre l’humanité commune et la divinité pleinement offerte.





Tout le reste, en forme de poésie, de musique, de chant : vous l’exprimez mieux que je ne saurais le dire avec des paroles. La beauté est plus proche du mystère que tous les mots pour le dire. Les anges nous le rappellent avec leur présence de troubadours de l’évangile. Les bergers -les premiers invités à la fête du ciel et de la terre- sont là pour nous le répéter : les pauvres auront toujours la priorité dans le cœur et la vie du nouveau-né de Noël.



Noël ! Mais attention : Noël peut aussi être un piège. Il peut nous scotcher au passé sous des images romantiques, des airs pastoraux, des souvenirs sentimentaux. Tout le monde aime Noël, même les chrétiens plus ou moins détachés de la foi, même les incroyants les plus convaincus. Qui ne célèbre pas cette fête, d’une manière ou d’une autre ? Noël se serait-il réfugié, pour survivre, dans le registre de la nostalgie religieuse ?



Cette nuit, avec l’Eglise, je vous invite à conjuguer Noël au présent, au présent de Dieu, dans l’actualité du Christ, dans l’aujourd’hui de nos vies.

Plusieurs moyens sont à notre disposition.

Il y a cette Parole que le Verbe de Dieu ne cesse de nous adresser à travers la Bible, surtout dans les liturgies, quand Jésus est encore servi aux bergers que nous sommes, dans une crèche de simplicité et de beauté.

Il y a aussi tous les pauvres de notre monde –et qui peut dire qu’il n’est pas parmi ceux-là, au moins à certains moments de son aventure humaine ? Le petit pauvre de Bethléem n’a-t-il pas dit un jour : « Tout ce que vous faites –ou pas- à l’un de ces petits qui sont mes frères, c’est à moi que vous le faites… ou pas » ? Alors là, surtout dans notre monde actuel, les possibilités de communion concrète sont vraiment infinies, sous les espèces de l’amour partagé, y compris avec celles et ceux qui ne sont peut-être pas aimables. Car quand on aime un peu comme Dieu, on ne compte pas, puisqu’il est le dernier en calcul parce qu’il est le premier en amour.



Et puis il y a le Noël suprême, pas seulement cette nuit, mais tous les dimanches, et même tous les jours, si nous en avons l’appétit : l’eucharistie, à savoir Jésus en personne enveloppé non plus de langes, comme à la crèche, mais enrobé de pain quotidien: « Prenez, mangez, c’est moi, c’est mon corps donné pour vous et pour la multitude.

Oui, le corps qui a grandi dans le sein de Marie durant 9 mois, le corps présenté aux regards étonnés et émerveillés des bergers de Bethléem, le corps qui fut en croix pour embrasser le monde entier et le serrer sur le cœur du Père dans un baiser de miséricorde.

Et le corps du vivant au matin de Pâques, avec des rayons de gloire jaillissant de ses plaies encore ouvertes pour nous montrer la victoire de l’amour sur tout mal, de la vie sur la mort, de l’espérance sur le non-sens.



Noël, ce fut la crèche. Maintenant, c’est la messe. Et tout ce qui va avec.

Et nous, sommes-nous avec ?



Claude Ducarroz

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