vendredi 18 avril 2014

Vendredi Saint 2014

Vendredi Saint 2014


Le Christ est en croix. Pour y mourir ou plutôt pour y donner sa vie.
Et si nous étions aussi là, près de lui, autour de lui, puisqu’il meurt pour la multitude ?
Car là où il y a Jésus, surtout dans l’acte du salut universel par amour, n’y a-t-il pas toute l’humanité à sauver ? N’y a-t-il pas toute l’Eglise, ce germe de l’humanité nouvelle ?
En voyant Jésus, Pilate ne l’a-t-il pas annoncé sans le savoir : « Voici l’homme ! » ? Tout homme. Tout l’homme.
Et quand l’évangéliste note qu’au pied de la croix de Jésus se tenaient sa mère et le disciple qu’il aimait, avec quelques femmes, n’était-ce pas déjà l’Eglise en son commencement ?
Et nous, où sommes-nous ?

Peut-être simplement avec la foule, avec les gens qui vont et viennent, à moitié curieux, un peu désolés, avec quelques questions de reste, une fois consultés les médias friands de sensationnel plus ou moins sanguinolent.
« Voici votre roi !», avait dit et fait écrire Pilate. Mais la foule avait répondu : « Crucifie-le !». Décidemment, on ne sait plus que penser, on ne sait plus qui croire.  Surtout quand on regarde de loin, avec certains qui rient, d’autres qui ricanent. Et dans les coulisses de l’histoire,  les autorités bien en place -politiques, militaires et même religieuses-, unies pour une fois afin de mieux éliminer tout concurrent possible.
Finalement, un fait divers pour les médias ! Combien aujourd’hui, chez nous, ont lu le journal plutôt qu’ouvrir l’évangile du Vendredi Saint ?

Et puis heureusement, il y a des femmes, les plus courageuses, parce qu’elles suivent jusqu’au bout en écoutant la voix de leur cœur, les chrétiennes de toutes les pitiés et piétés sincères. Certaines pleurent, anonymes, à quelque distance encore, les filles de Jérusalem. D’autres sont carrément au pied du gibet, mêlant leur compassion à la passion de Jésus. Que ferions-nous sans les femmes de foi et de tendresse dans l’Eglise d’aujourd’hui ?

Quatre hommes sauvent notre face, à nous les hommes. Enfin !
* Symon de Cyrène, requis mais généreux, l’icône de tous les hommes de bon cœur qui donnent temps, compétences et engagement dans les causes humanitaires, au secours de tous les crucifiés dans notre monde. Souvent sans même savoir qu’ils portent la croix du Fils de Dieu en soulageant la souffrance des damnés de notre terre, celles et ceux qui tombent sous les coups de la violence, de l’injustice et de l’exclusion engendrées par d’autres humains. Ils sont là puisque « tout ce que vous faites à ces plus petits qui sont mes frères, dit Jésus, c’est à moi que vous le faites. »

* Et puis il y a ce centurion, un soldat païen, ni juif ni chrétien, un étranger 100%, qui finit par dire, le premier de tous, la plus profonde vérité sur ce condamné à mort, la foi de l’Eglise, la nôtre : « Vraiment celui-ci était le fils de Dieu. »  Un porte parole inattendu, surprenant, mais si utile, le premier évangélisateur, le premier prédicateur, le premier catéchiste.

* Enfin  Joseph d’Arimathie et Nicodème,  les hommes de l’ensevelissement. Pas très glorieux, le premier était seulement disciple en secret. Et l’autre n’acceptait de rencontrer Jésus que de nuit. Mais au moment décisif, leur solidarité prépare finalement la résurrection, comme on le montre dans la chapelle du Saint-Sépulcre de notre cathédrale. Il n’est jamais trop tard pour soigner le corps de Jésus. Ils croyaient être les employés de la mort. Ils vont devenir les collaborateurs de la résurrection.

Où sommes-nous ? Osons-nous nous rapprocher encore de la croix ?
Là, tout près, sur l’une des deux autres croix ?

* Le larron du non ou celui du oui, au dernier moment ? Une vérité demeure, que rien ni personne ne peut nier : il ne faut jamais désespérer de la bonté de Dieu en Jésus Christ.
Quelle leçon pour nous, quand nous nous mettons à juger les autres ou à désespérer de nous-mêmes. Le premier canonisé, si l’on peut dire, était un criminel : « Aujourd’hui –quelle promptitude !, tu seras avec moi -quelle compagnie !, dans le paradis -quel séjour !
Cette humanité du pardon, cette Eglise de la miséricorde, là, sous la pluie d’eau et de sang coulant du côté ouvert de Jésus : les sacrements du baptême qui donne la vie et de l’eucharistie qui nourrit la vie. Dès ici-bas et pour l’éternité.

Enfin n’oublions pas l’Eglise la plus intense, Marie et Jean, là, embrassant la croix. Pas en très bonne compagnie, comme il se doit pour une communauté d’amour selon l’évangile. La Marie-Madeleine ne faisait-elle pas un peu tache parmi tant de sainteté ? Mais elle était là, avec les autres, elle qui sera bientôt la première témoin de la résurrection, chargée de l’annoncer aux apôtres sceptiques. Cette pardonnée de beaucoup de péchés, elle s’appuie sur l’Immaculée, Marie de Nazareth, la mère du crucifié. Car dans l’Eglise, la sainteté de pureté et la sainteté de pardon doivent toujours se donner la main. Sous la guidée de l’apôtre, celui que Jésus aimait.
Telle est l’Eglise au sommet. Elle est mariale et apostolique –car le disciple prit Marie chez lui- ; elle est sainte et en voie de sainteté ; elle est féminine et masculine; elle est la maison de l’amour de Dieu, avec des bras ouverts à l’infini, comme ceux de Jésus en croix, au moment où il dit : « Tout est accompli ».

Et alors, c’est déjà Pentecôte : « Inclinant la tête, il remit l’Esprit. »


                                               Claude Ducarroz

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