Chère
Europe
Je n’ai rien à cacher. Quand je suis né,
l’Europe venait d’entrer dans une guerre horrible qui battit tous les records
de barbarie. Comme tous les 20 ou 30 ans, depuis des siècles. Une fois de plus,
par je ne sais quel miracle, la Suisse était épargnée. Tant mieux pour elle.
Aujourd’hui, à l’heure des élections dans
l’Union Européenne, je contemple notre cher continent. C’est un autre miracle.
Les anciens ennemis irréductibles sont devenus des amis ; les nations,
jadis en guerre à répétition, collaborent pour la paix, le respect des droits
humains et la prospérité économique. Un fait merveilleux signe cette réussite
extraordinaire : les pays soumis durant des décennies au joug communiste
n’ont eu qu’un désir : rejoindre l’Union Européenne. Et ils ont été
accueillis. Bravo !
Sans doute l’Union Européenne est-elle encore
imparfaite, comme toute institution humaine, finalement encore très jeune à
l’aune de l’histoire universelle. Mais qui peut nier qu’elle a transfiguré pour
longtemps l’état d’esprit de notre continent, en exorcisant les instincts
guerriers, en diffusant une ambiance et une pratique de fraternité internationale
?
Et pendant ce temps, la Suisse boude ce grand
idéal de paix en voie de réalisation laborieuse. Nous qui avons échappé au pire
pendant que nos voisins souffraient le martyre, nous devrions être les
pionniers prophétiques d’un tel projet. Ne serait-ce que par reconnaissance
pour l’exception suisse entre 39 et 45, qui fit de notre pays un « béni
des dieux ». Oh ! bien sûr, nous ne sommes pas méchants. Seulement un
peu égoïstes. Quand il s’agit de prendre les risques de l’Europe unie, nous
mettons la main à notre porte-monnaie et nous estimons toujours que ça coûte
trop cher, que les bénéfices ne valent pas l’investissement. Sommes-nous tous
devenus des banquiers ?
Et pourtant, à y regarder de plus près, l’Union
Européenne, même perfectible, ne véhicule-t-elle pas des valeurs profondément
chrétiennes, même sans l’étiquette AOC ?
Tandis que les citoyens européens se donnent de
nouvelles autorités, là dans notre petit coin tout helvétique, nous devrions au
moins réfléchir. Et voir un peu plus loin que nos « monts
ensoleillés ».
Claude
Ducarroz
Cet article a paru
comme éditorial sur le site cath.ch
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