Pour la Saint Joseph
Il n’était pas un magicien, mais il a tout
transfiguré. Parce qu’il était -on pourrait dire « avant l’heure »-
un homme pascal !
* Il avait ses rêves d’homme amoureux,
puisqu’il avait une jeune et belle fiancée nommée Marie. Et il découvre dans un
silence pesant que sa fiancée est enceinte avant qu’ils aient habité ensemble.
* Il avait ses espérances de futur papa. Mais
il sait maintenant que cet enfant sera avec lui, mais pas de lui. Car « l’enfant
engendré en elle vient de l’Esprit Saint ».
* Il voulait fonder une famille ordinaire. Et
voici que tout devient extraordinaire, puisqu’il est seulement « l’époux
de Marie de laquelle fut engendré Jésus, que l’on appelle Christ. »
* Il était un honnête homme –un juste-, et un
croyant sincère, mais de là à obéir à un ange qui lui dit en songe de
prendre Marie chez lui –malgré tout-, et même en donnant à son enfant à elle le
nom de Jésus !
Reconnaissons-le : c’était beaucoup
demander à un homme qui avait bien des raisons d’être bouleversé, de ne pas
tout comprendre.
* Et ce n’était pas fini. Ils étaient bien à Nazareth.
Et voilà qu’il leur faut aller à Bethléem pour la naissance de cet enfant, dans
une étable et sur la paille. Quelle terrible surprise !
* Ils auraient bien prolongé un peu leur séjour
après l’accouchement, mais voilà qu’un despote cruel les oblige à fuir en
Egypte de nuit pour se mettre à l’abri de ses fureurs.
* Même dans la pratique ordinaire de leur
religion, ils doivent affronter quelques déconvenues, d’autant plus pénibles qu’elles vinrent de Jésus
lui-même au temple de Jérusalem, ainsi que Marie en fit le reproche: « Mon
enfant, pourquoi nous as-tu fait cela ? Vois, ton père et moi, tout
angoissés, nous te cherchions. »
C’est quoi le problème, me direz-vous, qui
bouleversa à ce point la modeste famille de Joseph, le charpentier de Nazareth ?
Leur problème, incontestablement, était bien plus qu’un problème : c’était
leur enfant, c’était Jésus. Leur enfant puisque tout le monde, là-bas,
l’appelait « le fils de Joseph, le fils du charpentier ». Et le fils
de Marie, évidemment.
Mais voilà, comme cela leur avait été dit et
comme ils le savaient ou plutôt le croyaient par la foi : Jésus, c’est le « Seigneur
sauve ». Il est engendré en Marie par l’Esprit Saint, il sera appelé Emmanuel
–Dieu -avec -nous-, Fils de Dieu, comme Marie en avait reçu la confidence,
avant de la transmettre à Joseph sur l’oreiller.
Oui, ils en ont fait l’expérience
rapidement : quand il y a Jésus qui est là, même tout petit, même encore
dans le sein de sa mère, ça change beaucoup de choses dans la vie.
Il met en route pour faire d’une simple visite
toute une visitation; il provoque une louange merveilleuse, mais qui finit en
chant révolutionnaire (« les puissants renversés de leurs trônes, les
humbles élevés, les orgueilleux dispersés, les affamés rassasiés, mais les
riches renvoyés les mains vides », etc…)
Car ça aussi, c’est Jésus, quand on
l’accueille, aujourd’hui comme hier. Comme Marie et comme Joseph.
Que de messages pour ce couple, y compris pour
Joseph. Et surtout que de passages –que de pâques- à faire quand on lit, pour
lui comme pour Marie : « Joseph fit comme l’ange le lui avait
prescrit ». La version masculine de la célèbre phrase de Marie :
« Qu’il me soit fait selon ta parole. »
Des messages aux passages : tel est
l’itinéraire de ce Joseph, un chemin au goût de Pâques. Mais peut-on dire cela
quand il est clair que Joseph n’était plus de ce monde lors de la croix de
Jésus, lors de sa résurrection ?
Oui, à cause de deux phrases héritées de
l’apôtre Jean, que Joseph a parfaitement
mises en pratique. Des phrases pascales justement, puisqu’il s’agit de « passer
de la mort à la vie ».
Et comment donc ?
En croyant que Jésus est le Fils de Dieu et en
manifestant de l’amour pour le prochain.
* Croire au Christ vivant, le fils de
Dieu : Joseph l’a vécu, y compris dans les obscurités d’une foi secouée
par beaucoup d’imprévus, mais toujours dans cette communion essentielle avec ce
Jésus qui lui disait affectueusement « papa » tout en lui rappelant
parfois qu’il se devait « aux affaires de son Père », l’autre. Une
foi très sollicitée, mais vécue dans la tendresse.
* Et persévérer dans un amour qui rayonne de
vie, l’amour conjugal avec Marie, l’amour paternel avec Jésus et toute la
parenté, l’amour diffusé dans son milieu par le métier et le voisinage, tout
simplement.
Pour Joseph, sans le savoir encore
théoriquement ni théologiquement, c’était ça déjà, vivre en enfant de la Pâque,
en promis à la résurrection.
Quelle belle leçon pour nous ! Mieux :
quelle magnifique feuille de route !
Car, à l’instar de Joseph, c’est bien à ce type
de mystère pascal que nous sommes appelés à communier ici bas, autrement dit
dans la foi et dans l’amour, en attendant les joies de la vie éternelle.
Parce qu’il y a déjà de l’éternel en germe dans
le cœur de tout croyant sincère, même dans le brouillard des idées ou
l’ankylose des mots.
Et il y a encore de l’éternel qui pointe déjà
quand un cœur humain bat au rythme d’un amour généreux et désintéressé, surtout
lorsqu’il va jusqu’au don de soi, jusqu’au par-don.
Nous qui sommes en route vers les célébrations
pascales, que la prière de saint Joseph, avec celle de Marie évidemment, nous
conduise des aléas cette vie -mélangée de joies et de croix- jusque dans la
gloire de la parfaite Pâque, dans le royaume de la résurrection.
19 mars 2016
Claude Ducarroz
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire