Les deux fenêtres de Nicolas
Heureusement, la Suisse et les Suisses se
souviennent de Nicolas de Flue. Ce grand saint mérite bien notre mémoire. Evidemment,
il y a plusieurs manières de commémorer les six cents ans de sa naissance, tant
le parcours de vie de frère Nicolas est original et sa sainteté multicolore.
Pour ma part, je me souviens d’une méditation
solitaire dans sa chambrette adossée à la chapelle de son ermitage. Je
remarquai deux petites fenêtres qui m’ont parlé très fort.
L’une donne précisément sur la chapelle, comme
une ouverture permanente sur le mystère de Dieu, et singulièrement sur la
présence eucharistique. Tout invite à la communion avec le Christ, tantôt dans
le silence, tantôt dans la célébration communautaire. On imagine le saint homme
longuement tourné vers l’autel où figurent la Parole de Dieu et le tabernacle.
Il ferme les yeux pour lire toutes choses du dedans de son cœur. Il ouvre les
yeux sur les signes laissés par le passage du Christ au milieu de nous.
Magnifique dialogue alterné qui sans cesse lui redit la raison profonde de son
étrange vocation.
L’autre fenêtre s’ouvre sur l’extérieur, plus
précisément sur le sentier par où arrivent les visiteurs et les pèlerins. Car
l’ermitage de Nicolas n’est pas un bunker religieux, mais plutôt un espace brûlant
de Dieu, donc largement ouvert sur le monde à aimer. Tout en répondant aux
appels de la solitude et de la prière, Nicolas demeura un frère accueillant à
celles et ceux qui recouraient à ses conseils. Plusieurs témoins ont remarqué son
amabilité et sa disponibilité. Tantôt venaient vers lui le chapelet des pauvres
anonymes, tantôt s’annonçaient les grands de l’Eglise et de la société. Tous
repartaient éclairés et réconfortés, non sans passer par la chapelle, car un
authentique saint conduit à Dieu et non pas à lui-même.
L’équilibre symbolisé par ces deux fenêtres
demeure plus que jamais une nécessité en notre temps marqué par un activisme
dévorant ou tenté par un spiritualisme désincarné. Aux uns, Nicolas de Flue
rappelle l’indispensable priorité de la vie spirituelle, celle qui puise
régulièrement dans le silence, la méditation et la prière. Aux autres, notre
saint patron souligne le devoir d’exercer une charité concrète dans le monde,
que ce soit dans les relations interpersonnelles ou dans les rudes débats de
société.
On peut, par vocation ou par goût personnels,
préférer telle fenêtre plutôt que l’autre. Mais de grâce, ne fermons aucune des
deux. Il les faut ouvrir ensemble pour
permettre les salutaires courants d’air de l’Esprit.
A paru sur le site
cath.ch
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