Homélie
Croire en Dieu en famille
La famille !
Notre joie ! Notre croix !
N’est-ce pas ainsi qu’on peut résumer la
situation des familles dans notre société occidentale ?
Notre joie, certes. Chacun de nous, par
expérience ou par souvenir, pourrait dire tout ce qu’il doit, en positif
d’amour, à sa famille, celle dont il est le fruit ou celle qu’il a lui-même
fondée. Sans doute n’y a-t-il aucune famille parfaite. Mais la vie,
l’affection, l’éducation et souvent la foi nous sont venues par elle. l’oublier.
Sachons le reconnaître et le dire à celles et
ceux qui nous firent de tels cadeaux.
Notre croix aussi. L’évolution des couples et
des familles dans le monde actuel est souvent la cause de bien des soucis et
même à l’origine de beaucoup de souffrances dont les enfants innocents font
souvent les frais. Inutile d’aligner des statistiques alarmantes - par exemple
sur les divorces, les familles sans mariage ou les familles monoparentales-
pour justifier nos perplexités, nos questionnements, nos inquiétudes.
Si ça peut nous consoler ou plutôt nous
encourager : la famille de Jésus de Nazareth ne fut pas non plus de tout
repos.
Tout semblait avoir très bien commencé
puisqu’il est dit dans l’évangile : « L’enfant Jésus grandissait et
se fortifiait, tout rempli de sagesse, et la grâce de Dieu était sur
lui ». Quoi de mieux ?
Mais plusieurs crises ont pourtant marqué
l’existence de la sainte famille.
Très tôt –il avait douze ans-, Jésus fait
problème en restant à Jérusalem avec les docteurs de la loi, tandis que ses
parents retournaient à Nazareth sans lui. Vous devinez l’angoisse. « Vois
comme nous avons souffert en te cherchant », lui dit Marie, en forme de
reproche à peine voilé. C’est qu’il lui fallait être chez son Père. Réponse
énigmatique, que Marie et Joseph ne comprirent pas sur le moment.
La vocation exceptionnelle de Jésus devait déjà
passer avant tout le reste, ce qu’il ne manqua pas de manifester par la suite,
au point que plusieurs fois les gens de sa famille le traitèrent de fou et
voulurent le ramener à la raison en le rapatriant à Nazareth.
En vain, car accomplir la volonté de son Père
–qui est aux cieux- était plus forte que tous les liens de famille ou de
village. Décidément la vie de famille avec Jésus, malgré la sainteté de ses
membres, ne fut pas un long fleuve tranquille.
Mais, au milieu de toutes ces vicissitudes, une
chose demeurait solide, c’est vrai : justement la vie de foi partagée. Car
ce Jésus surprenant devenait adulte « sous le regard de Dieu et des
hommes ». Et Marie, sans doute aussi en dialogue avec Joseph,
« gardait tous ces évènements et les méditait dans son cœur ».
Il n’y a pas de famille sans problèmes, sans
crises, sans épreuves qui peuvent faire mal, très mal parfois. Notre société,
avec sa moralité toujours plus élastique, favorise davantage le vagabondage
hédoniste que l’attachement aux valeurs solides qui soutiennent les familles.
Nous avons au moins cette chance : notre Eglise mise encore sur des amours
durables parce que fidèles, sur des couples consacrés par le sacrement de
mariage, sur des familles nourries par la vie spirituelle, sur les pardons qui
réconcilient et permettent de repartir avec confiance.
Je le sais : la vie de foi ne donne pas
une clef magique pour éviter tous les problèmes, voire certains échecs. Mais
elle propose aux couples un dessein d’amour de qualité, elle consolide les
familles dans un bonheur partagé, elle leur offre le carburant religieux pour
affronter les moments difficiles.
C’est une évidence : une famille sevrée
des nourritures spirituelles est plus fragile qu’une famille qui s’appuie sur
la parole de Dieu méditée, sur la prière à la maison, sur une participation
active à la vie de l’Eglise et à sa liturgie.
Pour tenir le coup dans une société veuve de
repères solides, il faut qu’il y ait du Nazareth dans nos familles. Pas la
perfection illusoire de la tranquillité plate – même à Nazareth, ce n’était pas
ainsi-, mais le bonheur jailli des efforts de tous pour grandir ensemble
« sous le regard de Dieu et des hommes ».
L’apôtre Paul pensait-il aux familles quand il
dressait pour les chrétiens de Rome la charte de la vie communautaire selon le
modèle de l’évangile ? Une telle qualité de relations vaut sans doute pour
tous les chrétiens, quel que soit leur état de vie, y compris pour les communautés
religieuses ou sacerdotales. Nous devons aussi nous interroger sur la
« vie de famille » que nous menons.
Mais il est certain que nos couples et nos
familles feraient bien de relire cette lettre pleine de bons conseils, qui
décline les multiples facettes de l’amour mis en pratique quand nous devons
gérer des « vivre ensemble » profonds au plus quotidien de
l’existence.
Pour relever ces défis, nous avons tout intérêt
à prendre avec nous la sainte famille de Nazareth, là où il y avait à la fois
de la liberté et de l’obéissance, de la piété et de l’ouverture aux autres, sur
les ailes de l’amour de Dieu et du prochain.
Jésus, Marie, Joseph : ce n’est pas une
recette magique, c’est une bonne compagnie à inviter, à fréquenter, à imiter.
Et nos familles trouveront ou retrouveront le bonheur de partager la foi,
l’espérance et surtout l’amour.
Claude
Ducarroz
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