lundi 29 octobre 2012

Homélie 30ème dimanche ordinaire

Homélie


30ème dimanche du temps ordinaire





Tout y était ! il ne manquait rien ni personne. Que voulez-vous de plus ? Il y avait Jésus, une foule nombreuse, ses disciples et même le pauvre de service. On connaît même son nom : Bartimée, le fils de Timée, un mendiant aveugle.

Et pourtant il manquait quelque chose –plusieurs choses- pour faire un évènement qui fasse un Evangile, une vraie « bonne nouvelle. »



Premièrement, le pauvre crie. Ou plutôt il prie ; il prie en criant vers Jésus : « Jésus, fils de David, aie pitié de moi. » Priorité au pauvre -à tous les pauvres, de toutes les pauvretés. Ils ont encore le droit de crier et de prier au cœur de notre monde à la fois merveilleux et cruel. Qui les entend ? qui les écoute quand ils crient « de plus belle », comme le Bartimée de Jéricho ?



Et que dit Jésus, que fait Jésus ?

Il l’appelle, ou plutôt il demande aux autres –et d’abord aux disciples et même à ceux qui l’avaient empêché de crier- de l’appeler afin qu’il vienne vers lui dans un élan, et même un bond, un saut pleins de confiance. Entre Jésus et lui, pour provoquer la rencontre de salut et de guérison, il y a des « serviteurs et servantes de l’appel », des ministères d’Eglise. Jésus appelle… des appelants. Jésus met en route des médiateurs de rencontre. Jésus suscite des services d’écoute et d’invitation. Surtout quand des pauvres souffrent, prient, crient.

« Appelez-le », dit Jésus. On appela donc l’aveugle en lui disant : « Confiance, lève-toi, il t’appelle. »



Là est la mission de l’Eglise, de toute l’Eglise… que nous sommes. Celle de chacun d’entre nous, chacun avec ses charismes propres. Personne ne peut dire qu’il n’a rien à faire, qu’il ne sait rien faire quand il s’agit de faciliter la rencontre entre Jésus et un pauvre. Ne serait-ce que parce que chacun de nous, quel qu’il soit, a été, est ou sera, comme Bartimée, un pauvre qui a besoin de Jésus, un criant et un priant, avec sa misère connue ou secrète. Nous sommes tous aussi des Bartimée.

Appelés ou appelants, il nous faut tous, tôt ou tard, jeter le manteau de nos fausses richesses, nous alléger de notre orgueil, pour bondir vers Jésus et nous jeter, confiants et libérés, dans les bras de sa miséricorde, le manteau en moins, la tendresse en plus.



Cette miséricorde, dans cet évangile, s’exprime dans un dialogue presque naïf, d’une merveilleuse simplicité : « Que veux-tu que je fasse pour toi ? », comme si Jésus ne le savait pas. C’est qu’il veut lui conférer la dignité du priant, qui collabore à sa propre guérison. « Rabbouni, dit l’aveugle, que je voie ! » Et Jésus de répondre : « Va, ta foi t’a sauvé. » Le sauveur semble s’effacer devant le nouveau « voyant » du salut. Un amour, une foi : tout l’ingrédient d’une vraie « bonne nouvelle. »



Il nous reste à contempler le résultat. Il est double : l’aveugle voit, c’est la moindre des choses, et en plus il suit Jésus sur la route. Peu à peu, il devient disciple, il rejoint une Eglise dynamique, toujours en chemin avec Jésus, vers d’autres pauvres, vers d’autres guérisons, vers d’autres bonheurs partagés.



On parle beaucoup ces temps-ci de « nouvelle évangélisation », y compris à Rome où s’achève le synode des évêques qui lui est consacré.

Tout est dans cet évangile.

Jésus continue de marcher au pas de notre humanité par les inspirations et les énergies de son Esprit, surtout quand il aperçoit des pauvres laissés pour compte au bord de nos routes. Evangéliser, c’est peut-être d’abord faire attention à eux, les appeler par amour à la suite de Jésus, leur révéler un évangile de libération et de promesse.

Et nous laisser évangéliser…en évangélisant.



Etre Eglise, faire Eglise, c’est surtout conduire au Christ, et non pas à nous. Ce n’est pas « faire du chiffre » pour l’Eglise, c’est faire signe pour Jésus, dans nos églises certes, mais aussi et surtout autour de nos églises, dans la vie de chaque jour, là où nous partageons le destin de nos frères et sœurs en humanité, à commencer par les plus pauvres, en leur donnant la main. Le tout enrobé de prière, certes, avec des appels courageux.

Mais surtout avec cette joie très particulière qui consiste à suivre Jésus sur la route – sa route – en donnant envie à d’autres de rejoindre l’humble cortège qui nous entraîne tous jusque dans la vie éternelle.

Eglise, Eglise que nous sommes : bon voyage !



Claude Ducarroz





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