lundi 31 octobre 2016

Homélie de la Toussaint

Toussaint 2016

La question est universelle. Tôt ou tard, chacun de nous se la pose, en son âme et conscience. Mais les réponses sont multiples, et parfois contradictoires. Pas facile d’y voir clair.

La question est celle-ci : y aurait-il quelque chose après notre mort ? Cette mort  -elle aussi universelle-  serait-elle la fin de tout pour nos personnes humaines ? Ou pouvons-nous caresser l’espoir de commencer alors autre chose, autrement, qu’on pourrait nommer la vie éternelle ?

Toutes les religions s’efforcent de répondre à cette question lancinante, mais chacune à sa manière propre. Et pourtant chaque religion dit au moins cela qui leur est commun à toutes : le destin de la personne humaine dépasse sa mortalité. Il y a encore une vie possible après la vie, cette vie. Notre destinée ne s’achève pas dans une tombe ou dans un four crématoire.

Mais de nouvelles religions sont apparues, surtout depuis le 18ème siècle, celui qu’on appelle « des Lumières ». Des esprits dits « libérés » prétendent que tout s’achève avec la mort, qu’il n’y a plus rien à espérer après.

Nous naissons par hasard et nous mourons par nécessité,  une fois pour toutes, pour toujours. D’ailleurs, disent-ils, jamais personne n’est revenu vivant depuis l’autre côté.

Eh ! bien, c’est justement là qu’un certain Jésus de Nazareth nous donne rendez-vous. Et ça peut tout changer. Et ça change tout.

Quelqu’un est né d’une femme, comme nous. Il a passé sa vie en faisant beaucoup de bien. On n’ose pas dire « comme nous ». Il a souffert, il est mort, pire que nous, sur une croix. Et il est ressuscité.
C’est ce dont ont témoigné celles et ceux qui l’ont retrouvé vivant après sa mort, à leur grande surprise, eux qui l’avait vu bel et bien mort sur la croix.

C’est peut-être vrai pour lui, diront certains, il a eu bien de la chance. Tant mieux pour lui. Mais est-ce que ce sera aussi vrai pour nous ?

A moins d’avoir à faire à un divin égoïste et menteur, nous pouvons faire confiance à la promesse sortie avec Jésus vivant au matin de Pâques : « Je vais vous préparer une place…afin que là où je suis, vous soyez aussi avec moi. »

Où ? Comment ?
Je vous avoue que je ne cherche pas à le savoir. Et d’ailleurs comment peut-on l’imaginer quand on est encore de ce côté-ci de la vie ? On n’a pas les instruments pour scruter ce ciel-là, le royaume de Dieu.

Voici ce qui me suffit : quelqu’un a vaincu la mort, il m’attend dans sa maison de gloire, là où il y a de nombreuses demeures pour tous ceux qui choisiront d’y entrer sur sa généreuse  invitation et avec notre libre acceptation.

Finalement, ce que le Ressuscité de Pâques nous offre gratuitement, n’est-ce pas ce que nous nous souhaitons, pour soi et pour ceux et celles que nous aimons : le bonheur éternel dans l’amour parfait ?
Autrement dit ce que  nous ne pouvons pas nous donner à nous-mêmes, car ça nous dépasse infiniment, mais que le Christ nous accorde au-delà même de nos plus chers désirs, par amour gratuit pour nous.

Alors nos petits bonheurs d’ici-bas, si fragiles, trop brefs souvent, mais qui ont un goût de « reviens-y », ne sont que le pâle apéritif de ce qui nous est promis dans le royaume de Dieu.

Là-bas, nous retrouverons nos chers défunts, en entrant chez Dieu, là où ils nous espèrent, eux avec qui nous vivons déjà en communion de foi et de prière, en attendant l’éblouissement du face à face pour toujours dans la lumière de Dieu, dans la joie pascale.

Claude Ducarroz

samedi 8 octobre 2016

L'évangile au quotidien

Mieux que « propre en ordre »
Luc 17,11-19

Quand Jésus circule par monts et par vaux, il fait des rencontres insolites. Aujourd’hui dix lépreux en quête de guérison.

Il y a un aspect « propre en ordre » dans l’évènement de ce face à face. Les lépreux se tiennent à juste et bonne distance. C’est conforme à la loi juive et aux obligations sanitaires. Jésus lui-même se met en concordance avec la tradition religieuse : il envoie les lépreux se montrer aux prêtres. Tout est bien en ordre !

Et puis tout change. Les lépreux sont guéris en cours de route. Le plus reconnaissant d’entre eux est un Samaritain. Encore un marginal. Mieux encore : la face contre terre,  il remercie Jésus –le mot exact serait « eucharistie »- et il rend gloire à Dieu. Dès lors, il expérimente une autre guérison.  Il ouvre les yeux sur le mystère de Jésus, il accède au monde de la foi, il devient peu à peu disciple. Jésus le relève –le vocable de la « résurrection » - et il l’invite à partir, au loin, pour témoigner, pour semer de la louange.

Il ne faut pas réduire cet épisode à un banal rappel de politesse. Oui, il faut savoir remercier pour tout cadeau reçu. Mais rendre gloire à Dieu dans une découverte de foi, c’est encore plus important, surtout après toute guérison, après tout pardon, après toute miséricorde. Il y a dans cette rencontre une étincelle pascale. Car cette foi au Christ guérit, mais aussi elle envoie, elle sauve, comme le rappelle Jésus lui-même.

Il ne faut pas sous-estimer la mention du Samaritain, « cet étranger ». Les neufs autres guéris ont accompli le minimum nécessaire. Le Samaritain a ajouté un retour de reconnaissance, un geste de louange, une petite liturgie d’action de grâces. Il est entré dans le mystère de l’Alliance.

Ne serait-ce pas une bonne feuille de route pour trouver ou retrouver la joie au pas chancelant de nos existences, au creux de nos épreuves, au cœur de nos prières ?

Claude Ducarroz


A paru sur   www.cath.ch

Burkini ou burka?

Blog
De burkini en burka

S’étaler sur les plages ou au bord des piscines n’est plus de saison. Mais la polémique autour du burkini et de la burka demeure d’actualité. Allez ! Je me jette à l’eau pour vous confesser ce que j’en pense. A mes risques et périls.

Aux premiers temps des bains de mer, nos arrière-grand-mères s’y plongèrent tout habillées sans soulever des vagues médiatiques. Aujourd’hui, notre société libérale tolère  l’immersion « tout nu » dans les eaux publiques, et ça ne provoque aucun scandale significatif. Que des femmes aillent se baigner en burkini ne me gène aucunement puisque, dans la mare de permissivité qui nous environne, chacun fait ce qu’il veut, pourvu que ça n’empêche pas les autres de faire de même. Franchement, je ne vois pas en quoi ces femmes voilées « à l’eau » provoqueraient des raz de marée dangereux, ni pour les corps ni pour les âmes. Les tenues lascives des sirènes dénudées me semblent plus problématiques que cet excès de pudeur.

Il en va autrement de la burka qui cache entièrement le visage. Dans le contexte où nous sommes, l’Etat peut exiger que, sauf exceptions codifiées, les citoyens se présentent à visage découvert, ne serait-ce que pour des raisons de sécurité et de contrôle tout à fait légitimes. Mais attention ! Cette exigence n’a rien à voir avec la religion, et encore moins avec telle religion. On doit attendre cette posture de tout citoyen quel qu’il soit, et d’abord des énergumènes cagoulés qui sèment la violence dans nos rues et sur nos places. D’ailleurs ces casseurs  me semblent bien plus dangereux que les rares femmes entièrement voilées qui fréquentent les boutiques de luxe durant leur séjour touristique en Suisse.

Ne tombons pas dans ce piège : faire de cette législation une manoeuvre inavouée pour combattre l’islam chez nous.  On ne gagne jamais à discriminer un groupe sous prétexte de démocratie et par motif de religion. Dans le passé, les catholiques l’ont appris à leur dépens. Ils jouent avec le feu –celui qui peut allumer des incendies – ceux qui veulent se servir d’une loi raisonnablement sécuritaire pour lancer des grenades juridiques et policières contre l’islam.

Burkini : pourquoi pas ? Se camoufler complètement son visage : non. Mais pour tous !

                                                                                              Claude Ducarroz


A paru sur le site www.cath.ch