mercredi 11 avril 2018

Poème de mon frère Bernard

Par dessus les frontières
Par-dessus les frontières
L’amitié nous répond
Si tu es la rivière
Je serai le pont
Par-dessus nos orages
Il y a tant de ciel bleu
Qu’on y voit sans nuages
Le soleil quand il pleut

Par-dessus les frontières
L’amitié nous répond
Donne-moi ta lumière
Je serai chanson
Par-dessus nos musiques
Il y a tant d’alizés
Que ces mots sont magiques
Nous revoir, nous aimer

On a la clef de vos problèmes
Vous êtes une île à nos bateaux
Pour le panache et la bohème
On est enfants de Cyrano

A sauts de notes, à saut d’arpèges
Nos cœurs ont pris le grand galop
Chevaux de bois, chevaux de neige
On se retrouve un ton plus haut

Le temps nous offre un verre à boire
On a gardé la channe au frais
Vous êtes un peu de notre histoire
De la montagne et des chalets

Notre pendule est en vacances
On a le temps de vous chanter
Tous les printemps de la romance
Rosiers d’amour et champs de blé

Le monde est là devant la porte
Qu’il est petit vu de là-haut
Dans la fusée qui nous emporte
On peut rêver des temps nouveaux
Bernard Ducarroz                                                                            Poème posthume




dimanche 8 avril 2018

Homélie 2ème dimanche de Pâques

HOMELIE
2ème dimanche de Pâques 2018

C’est la noce à Thomas… et nous y sommes aussi.
Car derrière les figures et les évènements décrits dans cet évangile, se cache le miroir de l’Eglise…que nous sommes.
Cette première Eglise a commencé par s’enfermer dans la peur, portes closes et même verrouillées. C’est le ghetto religieux, la forteresse assiégée « par peur des juifs ». Certains diraient plutôt aujourd’hui « par peur des musulmans ».

Heureusement, Jésus, sans enfoncer la porte, vient et il est là au milieu d’eux. Sa fidélité est plus forte que nos peurs. Abondamment, il redonne à ses disciples les cadeaux de sa Pâque : la paix, l’Esprit Saint, le pardon, les conditions de la vraie joie. Non sans leur rappeler qu’il les envoie comme le Père l’a envoyé, jusqu’au bout du monde –les périphéries, dirait le pape François-. Il leur faudra sortir, ce qu’ils feront bientôt sous la poussée de ce même Esprit Saint, le jour de Pentecôte.

Mais chez les Douze comme dans l’Eglise d’aujourd’hui, il y a souvent des absents. On peut même affirmer qu’ils sont largement majoritaires actuellement. Thomas n’est pas là. Il a bien gardé quelques contacts avec les autres apôtres, mais on ne lui fera pas croire n’importe quoi. Ils ont vu le Seigneur ressuscité ? Tant mieux pour eux, mais lui, il ne croira pas, à moins de voir la marque des clous et de toucher le côté blessé de Jésus. Un malcroyant moderne et un homme en plus, un vrai. Il lui faut plus qu’un témoignage, toujours suspect de naïveté religieuse. Il a besoin de preuves tangibles.

Jésus est bien patient et bien bon. Il répète pour Thomas la scène du soir de Pâques, tout en s’adaptant au dur à cuire qu’était cet apôtre. Car l’évangélisation peut comporter des étapes. Il invite Thomas à le toucher, tout en lui proposant de baisser sa garde : « Cesse d’être incrédule. Sois croyant. »
Il se produit alors ce qui arrive encore souvent aujourd’hui. Touchés par la grâce, les plus durs à croire deviennent parfois les plus croyants, une fois passée la crise de… foi. Mieux que d’autres, l’ex-incroyant devenu croyant exprime la foi de l’Eglise concernant le mystère du Christ : « Mon Seigneur et mon Dieu. » Ce qui lui vaut une béatitude personnalisée : « Heureux ceux qui croient sans avoir vu. »
Oui, il peut, il doit y avoir un bonheur à croire, même si l’on ne voit rien ou pas grand’chose. Car le Seigneur continue de nous faire signe, avec l’espoir que les chrétiens deviennent eux-mêmes des signes invitant les autres à croire, même avec quelque retard à l’allumage, comme ce fut le cas pour Thomas. Il y a tellement de Thomas en attente dans notre monde.
Quels signes Jésus continue-t-il de nous adresser aujourd’hui comme au temps des apôtres, à nous qui sommes son Eglise en notre temps ?
A la fin de l’épisode de Thomas, l’évangéliste rappelle que beaucoup de signes sont consignés dans un certain « livre », à savoir la Parole de Dieu mise par écrit, qu’il nous faut lire, méditer, mettre en pratique.
Et puis, dans ce même passage, il y a place pour deux sacrements. D’abord le pardon des péchés, sous diverses formes, pour nous rendre la paix du cœur et de la conscience. Et puis l’eucharistie, ce mystère par lequel, d’une certaine manière, nous touchons le corps du Christ, comme Thomas l’a fait, ou plutôt nous nous laissons toucher par Jésus en son corps et en son sang, la plus belle preuve de son amour.
Mais après cela, et bien d’autres grâces encore, comment devenir nous-mêmes des signes qui font signe ? Les deux autres lectures de cette messe répondent à cette question.
D’abord tenir bon dans la foi, courageusement. Pas de manière arrogante, mais sans en avoir honte non plus. Car, nous rappelle l’apôtre Jean, qui donc est le vainqueur du monde ?– le monde qui s’oppose à Dieu-, c’est celui qui croit que Jésus est le fils de Dieu. Oui, une foi forte mais humble, en dialogue avec les incroyants ou les croyants d’autres religions, comme nous y invite aussi le pape François.

Et puis, il y a la vie très concrète, pour que notre foi ne se réduise pas à de pieuses déclarations théoriques.
La qualité de l’ambiance que l’on trouve dans les communautés chrétiennes doit plaider pour la vérité de l’évangile.
« La multitude de ceux qui étaient devenus croyants avait un seul cœur et une seule âme », rapporte l’auteur des Actes des Apôtres. Et ça va loin, puisqu’il est précisé : « Personne ne disait que ses biens lui appartenaient en propre, mais ils avaient tout en commun. » C’est ce qui conférait au témoignage des disciples une grande puissance, car cette solidarité leur permettait de distribuer en fonction des besoins de chacun.
Il n’y a pas de communauté chrétienne crédible sans l’esprit de partage et d’entraide, preuves d’une vraie fraternité, dans et hors du cercle des croyants.
Sans oublier la promesse pascale répétée à la fin de l’évangile de ce dimanche : «  … pour qu’en croyant, vous ayez la vie en vous. »


Claude Ducarroz

mercredi 4 avril 2018

Et après Pâques?

Et après ?

Et voilà ! C’est déjà fini. Pâque est passée. On a profité des vacances, malgré le temps maussade. Certains sont venus à l’église. Il y avait foule en quelques endroits privilégiés. C’était en « petit comité liturgique » dans la plupart des sanctuaires plus modestes. Ainsi va la vie !
Et après ? Et maintenant, après Pâques ?
« Fils de Dieu, vous êtes fils de la résurrection », dit Jésus (Cf. Luc 20,36). Surtout après avoir fêté Pâques. Et comment donc ?
J’entrevois trois terrains d’exercice prioritaires.
* Ne serait-ce pas le plus beau service que les chrétiens puissent rendre à toute l’humanité, y compris à celles et ceux qui se définissent incroyants ? A savoir continuer de croire et d’affirmer que le destin de toute personne humaine dépasse les étroites limites de sa naissance et de sa mort.
Nous sommes les veilleurs de l’éternité, les gardiens de la transcendance humaine. Nous estimons tellement la valeur de la personne, quelle qu’elle soit, que nous persistons, fût-ce contre vents et marées, d’annoncer sa mystérieuse dignité par sa vocation à la vie éternelle au-delà de la mort. Plus que jamais, quand semblent s’éteindre les lumières de la foi, il nous faut entretenir ardemment la petite bougie allumée à la flamme du cierge pascal. Elle nous rappelle cette merveille : l’être humain –tout humain- est à ce point accroché à Dieu qu’il n’échappera jamais au rayonnement de son amour puisque la vie a été plus forte que la mort dans l’évènement de la résurrection de Jésus de Nazareth. Dont acte.
* Tout cela peut paraître bien spirituel, et même surnaturel. Alors soignons aussi notre deuxième terrain d’exercice pascal. Je pense à l’Eglise. Des chrétiens, errants dans les tempêtes de l’individualisme religieux ou irréligieux, ne tiennent pas le coup très longtemps. Notre foi –pur don de Dieu- nous est aussi offerte par une communauté. C’est en communauté que nous pouvons continuer de croire au Dieu de Jésus Christ, et même de donner envie d’y croire. La vague pascale doit irriguer nos communautés chrétiennes comme une rivière peut féconder même les rivages les plus asséchés. Chrétiens re-nés à Pâques, nous ne pouvons que soutenir plus ardemment les projets de renouveaux de l’Eglise tels que le pape François et tant d’autres leaders religieux nous les proposent, en particulier du côté des périphéries humaines et par des réconciliations œcuméniques. Il serait étonnant, et même navrant, que l’Eglise ne soit pas davantage « réformée », autrement dit « fille de la résurrection ».
* Mais nous ne sommes pas chrétiens –par grâce - seulement pour nous.  Le dessein de Dieu en Jésus vise toute l’humanité. Rien ne nous empêche –bien au contraire- de semer dès ici-bas des graines pascales dans les strates complexes de notre humanité. Dans nos relations quotidiennes, chacun avec les charismes dont il dispose, nous pouvons transformer, voire transfigurer l’ambiance de notre société. Sans l’illusion de construire un impossible paradis sur la terre, il est important que les chrétiens, unis à tous leurs frères de bonne volonté, créent des ilots de justice, de paix et de fraternité partout où ils vivent et agissent. Que voilà de belles pâques anonymes, mais réelles, qui peuvent peut-être augmenter dans le cœur des personnes le bienheureux désir du royaume de Dieu promis.
Tout a été accompli sur la croix et dans la Pâque de Jésus.
Mais avec lui, d’une certaine manière, tout reste à faire.
Le Ressuscité embauche toujours. Allons-y !

Claude Ducarroz                                                                                       3487 signes