Fête de Saint Nicolas
2017
Qu’est-ce qu’il faut pour faire un beau St
Nicolas à Fribourg ? Vous l’avez vu une fois de plus samedi soir dernier.
Il faut d’abord un faux évêque avec une
crosse et une mitre, et surtout une longue barbe blanche. Il faut ensuite un
âne plutôt docile pour y transporter le céleste prélat. Il faut aussi quelques
pères fouettards pour faire semblant d’épouvanter les enfants pas sages. Il
faut enfin une bonne réserve de biscômes pour récompenser les sages, de loin
les plus nombreux à Fribourg.
A chacun, parmi nous, de jouer le rôle qu’il
préfère.
Qu’est-ce qu’il a fallu pour faire un vrai
saint Nicolas, en son temps, à Myre, autour de l’an 300 ?
* D’abord être un saint, autrement dit un
chrétien, re-né des sources du baptême. Quelqu’un qui a entendu le Christ
frapper à la porte de son cœur, comme l’a rappelé le texte de l’Apocalypse.
Quelqu’un qui a ouvert la porte et a
invité ce Christ à entrer chez lui pour l’accueillir comme une bonne nouvelle
en personne. Et Jésus a pris la cène avec lui, dans l’intimité de la plus
profonde des communions. Quel bonheur !
Un saint ordinaire en somme, le chrétien
Nicolas. Un peu comme nous, mais en mieux.
* Et puis il était évêque. Pas comme on le
représente souvent chez nous en Occident, à la manière de nos épiscopes un peu
baroques. Mais certainement assez proche de ce beau patriarche œcuménique que
les chanoines de notre chapitre ont rencontré il y a trois semaines à
Constantinople. Je l’imagine à la fois simple dans la rencontre et hiératique de
prestance, un père, un pasteur. Pour tout dire : un évêque. Oui, l’humble
serviteur appelé par son peuple, choisi par ses confrères, consacré par l’Esprit,
avec l’imposition des mains de ses frères de ministère et sous la houle de la
prière de toute l’Eglise. Nicolas, évêque de Myre.
* Quel évêque ? Tant de légendes tressent
trop de couronnes pour que toutes soient vraies. Mais peu importe. Ces rumeurs
vont toutes dans le même sens, et c’est bien suffisant pour accorder un solide
crédit au portrait global du saint évêque Nicolas.
Il s’est investi à fond pour les plus petits et
les plus pauvres, les plus malheureux et les plus menacés. Des enfants
sacrifiés, mais aussi des jeunes filles en perdition. Des marins à la dérive et
des frères et sœurs affamés. Il fut le chrétien de l’évangile de tout à l’heure,
en Marc 10 (« Laissez venir à moi les enfants »), mais aussi celui de
Matthieu 25 (« Tout ce que vous faites à l’un de ces petits qui sont mes
frères, c’est à moi que vous le faites »).
Il fut l’évêque de toutes les nobles causes,
pour la justice et pour la paix, car la bonne nouvelle qui mène au Royaume de
Dieu ne saurait éteindre –mais plutôt raviver- les incendies d’amour que Jésus
est venu allumer sur la terre pour la rendre plus fraternelle.
* Les spécialistes nous le disent : il y a
au moins un évènement certain dans la vie foisonnante de Nicolas de Myre :
il a participé au concile de Nicée en 325. Le Chapitre cathédral était à
quelques kilomètres de ce lieu historique il y a moins d’un mois.
Tiens ! Déjà un concile œcuménique, le
premier. Et pour quoi faire ?
Pour préciser et approfondir la foi trinitaire
et pascale, pour soutenir une courageuse fidélité à l’évangile, pour consolider
la communion des Eglises dans la koinonia de l’Eglise « catholique et
apostolique », selon les propres termes du concile.
Et si nous étions tous un peu des saints
Nicolas ? On peut se permettre cette bienheureuse audace à Fribourg
puisque certains estiment que les Fribourgeois, qu’ils soient du dedans ou du
dehors, sont d’une certaine manière les « chers enfants » de leur
saint patron. Il y a donc un ADN de saint Nicolas dans les gènes de notre
christianisme.
Sans faire la leçon à personne, m’est-il permis
d’en dessiner quelques traits, d’en dresser un modeste portrait, à mes risques
et périls ?
* Comme Nicolas, être des chrétiens des
profondeurs baptismales, à égalité de grâce, de vocation et de mission, bien
avant les différences confessionnelles ou institutionnelles, dans la vérité de
la foi, dans l’élan de l’espérance, dans une chaleureuse charité.
* Comme Nicolas, être en service d’Eglise –même
sans être évêque- par tous les engagements correspondant aux innombrables
charismes, ministères et activités qui fleurissent dans la vie des chrétiens -hommes
et femmes-, eux qui animent nos communautés en s’y investissant si
généreusement, si évangéliquement.
* Comme Nicolas, sans mépriser personne, mais
faire le choix des pauvres, des souffrants et des exclus afin que les chrétiens
–et par conséquent aussi nos Eglises- donnent le témoignage de leur liberté et
de leur courage d’aimer, y compris à la face des grands et des puissants de ce
monde.
* Comme Nicolas, travailler avec persévérance -et
même avec une certaine passion- pour la communion des Eglises, que ce soit dans
l’œcuménisme spirituel, théologique, liturgique ou tout simplement fraternel.
En chacun de nous, il y a un petit Nicolas qui
sommeille peut-être. Le temps de l’Avent peut le réveiller et bientôt Noël le conduira
à la crèche. L’évangile va le guider sur les chemins de sa Galilée et
finalement il nous rassemblera tous au pied de la croix. Et nous serons
entraînés vers la vraie vie au matin de Pâques et l’Esprit de Pentecôte va nous
dynamiser pour nous envoyer comme témoins du Christ dans notre vaste monde.
Voyez comme elle est belle, l’Eglise, quand on
est tous ensemble, dans le cœur du Dieu Père, Fils et Saint-Esprit, et dans la
communion des saints.
Claude Ducarroz
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