samedi 1 février 2014

Fête de la présentation du Seigneur

Homélie
Présentation du Seigneur

Où sommes-nous avec l’évangile de ce jour ? Le texte et le récit débordent d’allusions à l’Ancien Testament. Comme tout se passe dans le temple de Jérusalem, il n’est pas étonnant que l’on se sente en plein milieu juif, avec les rites prévus par la Loi, jusque dans certains détails, comme la mention touchante des deux petites colombes, l’offrande des pauvres.

Au-delà de l’épisode devenu pour nous un peu exotique, que faut-il retenir de cet évènement ?
D’abord que Jésus, par sa famille humaine, était  un juif, un bon juif. Si le christianisme s’est peu à peu détaché du judaïsme, il nous faut reconnaître tout ce que nous lui devons. C’est pourquoi nous gardons, parmi nos textes fondateurs et dans notre liturgie, les paroles de l’Ancien Testament –que certains préfèrent nommer actuellement « la première alliance »-, car nous ne pouvons pas renier nos racines spirituelles.

Jésus lui-même, dans le dialogue avec la Samaritaine, lui rappelle que « le salut vient des Juifs », mais en ajoutant que « l’heure vient, et c’est maintenant, où les vrais adorateurs adoreront le Père en esprit et en vérité ». Autrement dit n’importe où, et non plus seulement à Jérusalem. Ce qui ne justifie en rien un antisémitisme ou un antijudaïsme qui servit, hélas ! de couverture à d’horribles massacres et discriminations dans la tragique histoire de notre Europe.

Retrouvons Marie et Joseph, les parents de Jésus, dans l’enceinte du temple de Jérusalem. Il nous faut recueillir le témoignage de deux prophètes qui nous permettent à la fois de garder le lien avec la source juive et de faire le pas vers le salut universel, le tout sous l’action de l’Esprit Saint, comme c’est clairement indiqué dans ce même évangile.

* Syméon reconnaît en Jésus de Nazareth le Messie du Seigneur. Mais il ajoute que cet enfant est appelé à offrir le salut à la face de tous les peuples, « lumière pour éclairer les nations païennes et gloire d’Israël ton peuple. » Le lien est donc fait.

* Et puis il y a cette femme mystérieuse, Anne, fille de Phanuel, une veuve âgée de 84 ans, qui prophétise, elle aussi. Ce qui prouve que les femmes, hier dans le temple de Jérusalem comme aujourd’hui dans l’Eglise, peuvent prophétiser, autrement dit : « proclamer les louanges de Dieu et parler de l’enfant à tous ceux qui attendaient » le salut. Entre parenthèses, que ferions-nous, dans notre Eglise, sans l’engagement des femmes, jadis souvent religieuses, aujourd’hui plutôt laïques, qui donnent tant d’elles-mêmes pour faire vivre nos communautés et témoigner de l’évangile au cœur du monde ?

Mais revenons au texte même de cet évangile. Trois personnes sont au centre de tout : les parents de Jésus, et Jésus lui-même évidemment. Pour tous les trois, les prophéties ne sont pas d’emblée les plus agréables. Tout pointe déjà vers la passion du Christ, ce fils qui provoquera la chute et le relèvement d’un grand nombre en devenant un signe de division. Et puis Marie sera associée de près à son destin puisque son cœur sera transpercé par une épée. On sait maintenant que Marie était là au pied de la croix de Jésus quand son cœur à lui fut transpercé par la lance du soldat, lorsqu’il en sortit du sang et de l’eau.

Mais il faut aussi retenir ce que disait Syméon, une prophétie aux accents plus orientés vers Pâques puisque Jésus est appelé lumière des nations et gloire d’Israël. Dès le départ de sa route humaine, Jésus est déjà présenté dans l’entier du mystère pascal parce qu’il ne faut jamais séparer la croix et la résurrection.

Et en attendant, me direz-vous ? Le Verbe fait chair, la Parole incarnée se tait, longuement. L’enfant, en effet, « grandissait et se fortifiait, tout rempli de sagesse, et la grâce de Dieu était sur lui. » Rien que cela pour résumer la trentaine d’années passées à Nazareth, dans ce bled perdu de Galilée, sous le couvert de l’anonymat, comme on dirait aujourd’hui. Rien ou presque pour le superficiel, le paraître, la gloriole, mais une lente croissance intérieure, dans une progressive conscience de son être profond, à savoir qu’il est le fils du Père, même si on le prenait pour le fils de Joseph, le charpentier. Et ça ne le dérangeait pas !

Savoir qui l’on est vraiment, prendre conscience de sa vocation, découvrir sa place dans la société et dans l’Eglise : c’est le lent travail de l’Esprit en nous, loin des effets spectaculaires, dans l’ambiance de la prière, de l’écoute de Dieu à l’intérieur de nous-mêmes, du silence qui est le terreau idéal pour les authentiques croissances personnelles. Même si nous sommes engagés dans toutes sortes d’activités sociales ou apostoliques, il nous faut retrouver de temps en temps l’atmosphère de Nazareth, en compagnie de Jésus, Marie et Joseph, en toute simplicité de vie.

Car pour nous comme pour eux, quelles que soient les circonstances de nos existences souvent bousculées, c’est ce mystère qui doit dominer notre vie d’être humain et de chrétien : « Les parents de Jésus le portèrent au temple de Jérusalem pour le consacrer au Seigneur. »
Or consacrés, nous le sommes, comme créatures humaines à l’image de Dieu et comme baptisés dans le nom du Dieu Père, Fils et Saint Esprit. Et la grâce de Dieu est aussi sur nous.
Nous y pensons spécialement aujourd’hui, jour qui commémore la vie religieuse, mais aussi dimanche de l’apostolat des laïcs.
Si l’on peut le dire fraternellement aux uns et aux autres : bonne fête et grand merci !
Amen                         


Claude Ducarroz

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