dimanche 3 février 2019

Homélie

Homélie 3 février 2019 Nazareth ! Jésus de Nazareth ! C’est ainsi qu’on l’appelait dans sa région d’origine, la Galilée. On le nommait aussi fils de Joseph, ou fils de Marie, ou tout simplement le fils du charpentier. Et c’est précisément dans la synagogue de son village que nous retrouvons Jésus aujourd’hui, oui à Nazareth dont on disait alors : « De Nazareth, peut-il sortir quelque chose de bon ? » Eh ! bien Jésus, le fils de l’homme et le fils de Dieu, est sorti de là. Mais il faut aussitôt ajouter : à condition d’en sortir, précisément. En effet, pour réaliser sa mission, Jésus a dû opérer une double sortie, des prises de distance nécessaire à l’accomplissement de la volonté de Dieu son Père sur lui. Jusqu’à 30 ans environ, comme l’attestent les Ecritures, Jésus fut un enfant puis un jeune homme qui « grandissait en taille, en sagesse et en grâces, devant Dieu et devant les hommes ». Homme parmi les hommes. Luc 2,40 et 52. Plus encore, il était soumis à ses parents, et sa mère Marie « conservait et méditait tous ces événements dans son cœur ». Encore que, à l’âge de 12 ans, en profitant du pèlerinage annuel à Jérusalem, quand il faussa compagnie à ses parents tout angoissés qui lui reprochèrent cette petite fugue, il eut cette parole d’avertissement : « Ne savez-vous pas qu’il me faut être chez mon Père ? » Plus tard, à deux reprises, il eut à nouveau l’occasion de remettre chacun à sa vraie place, selon son projet de vie à lui. Quand sa mère et sa parenté se tenaient dehors alors que la foule les empêchait de le contacter, Jésus dit en promenant son regard sur ses disciples: « Ma mère et mes frères, ce sont ceux qui écoutent la parole de Dieu et qui la mettent en pratique. » Il y avait aussi tout un clan à Nazareth. En admirant le jeune Jésus tellement savant dans la synagogue, « ils s’étonnaient des paroles de grâce qui sortaient de sa bouche ». Mais quand Jésus leur signifia que sa mission doit dépasser largement les confins de son village et même les limites de son peuple, ils deviennent furieux. Que le Nazaréen Jésus se mette à vanter la foi de certains païens, c’en est trop. Ils le chassent violemment hors de son village. On signale même, une autre fois, que des gens de sa parenté sont venus pour s’emparer de lui en estimant « qu’il avait perdu la tête ». On comprend alors la conclusion de Jésus lui-même, devenue un proverbe toujours d’actualité : « Aucun prophète ne trouve un accueil favorable dans son pays. » Qu’est-ce que tout cela peut avoir encore à dire à nous, qui sommes l’Eglise d’aujourd’hui, autrement dit la famille de Jésus en notre temps ? Une statistique est sortie cette semaine, qui doit nous faire réfléchir, même si j’ai conscience que les chiffres ne disent pas tout, et même pas l’essentiel. En 1980, en Suisse, le 90% de la population se rattachait au christianisme, à travers les deux confessions principales, la catholique et la protestante. Aujourd’hui, en 2017, nous ne sommes plus que 60%. Attention ! pas tellement parce que d’autres religions ont progressé parmi nous – les musulmans forment moins de 5% de notre population-, mais parce que les personnes qui se déclarent sans religion représentent maintenant 26 % de notre population, à savoir légèrement plus que le nombre des protestants. Quant aux catholiques, nous sommes encore 36%, mais aussi en baisse. Nous pourrions aussi nous replier sur nous-mêmes, par un réflexe de ghetto assiégé, en ignorant ceux qui ne pensent pas comme nous ou en maudissant ceux qui nous ont quittés. Ce serait une manière un peu lâche de refuser de nous remettre en question nous-mêmes, sur les raisons de certains éloignements ou de certains abandons. Je rencontre de plus en plus des gens qui, fondamentalement, disent oui à Jésus, mais non à l’Eglise, du moins telle qu’elle se présente, même aujourd’hui, avec le pape François. Je ne dis pas qu’ils ont toujours raison, mais je crois que nous devons nous interroger, y compris les prêtres évidemment. Et revenir à l’essentiel, à savoir la figure toujours actuelle et toujours vivante de Jésus de Nazareth, notre frère et notre Dieu. Et son Evangile évidemment. C’est plus que jamais urgent. Alors, c’est lui qui nous envoie vers les autres, pas pour les juger et encore moins pour les condamner, mais comme le répète sans cesse saint Paul à la suite du Christ, pour les aimer, gratuitement, à commencer par les plus pauvres et les plus souffrants, ces frères et sœurs humains des périphéries de toutes sortes dont parle si souvent notre pape François. Comme le prophète Elie fut envoyé vers la veuve de Sarepta au pays de Sidon, comme Elisée fit tout pour guérir Naaman le Syrien. Nous n’allons pas nécessairement améliorer nos statistiques. Jésus ne nous demande pas de faire du chiffre, mais de faire des signes, des signes d’évangile, de témoigner pour sa vérité en l’enrobant d’amour, de justice et de paix. Et Jésus, dit l’évangile, « passant au milieu d’eux, allait son chemin. » C’est aussi lui qui dit un jour à ses disciples inquiets pour leur avenir, et donc aussi à nous : « Sois sans crainte, petit troupeau, car votre Père a trouvé bon de vous donner le Royaume. » Claude Ducarroz

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