Dans la houle des foules
L’a-t-on
assez remarqué ? 2019 se signale par les très nombreux rassemblements de
masse à travers le monde entier. La liste est impressionnante. Et les motifs
fort variés. La misère basique, le manque de liberté civique, le mépris des
femmes, l’urgence climatique, l’oppression sous toutes ses formes, les
inégalités sociales, la cruauté de la guerre : toutes ces raisons, et
d’autres encore, ont fourni matière à se réunir pour crier, tantôt une révolte
spontanée, tantôt des exigences étayées, toutes, en vérité, pour remettre en
question le ou les systèmes qui dominent la guidée de notre aventure humaine.
Décidément,
il y a quelque chose de détraqué dans la mécanique sociale qui gère notre
présent et prétend régenter notre avenir en ce monde. Même la Suisse –pays par
excellence des compromis tranquilles- n’a pas échappé à quelques fièvres
surprenantes. Des dizaines de milliers de femmes dans les rues pour réclamer un
plus grand respect de leurs personnes et de leurs droits ; des centaines
de milliers de citoyens - emmenés par des jeunes fervents- pour clamer leur
volonté de faire davantage pour la survie de notre planète : voilà qui
constitue des épisodes significatifs, qu’on aurait grand tort de sous-estimer.
Ils
font partie de ces « signes des temps » que le concile Vatican II
avait définis ainsi : « Les événements, les exigences et les requêtes
de notre temps, auxquels les chrétiens participent avec les autres
hommes », en ajoutant : « L’Eglise a le devoir, à tout moment,
de scruter ces signes des temps et de les interpréter à la lumière de
l’Evangile. »
Quand
on parcourt l’actualité de 2019, comment les chrétiens pourraient-ils rester
indifférents aux thématiques soulevées par ces multitudes en marche ?
Comment se contenteraient-ils de regarder passer les cortèges de l’Histoire en
bavardant sur les trottoirs de la simple curiosité ? Ne devrions-nous pas
nous intégrer à toutes les solidarités sociales et à toutes les imaginations
créatrices pour changer le cours de notre destinée et améliorer la condition
humaine, à commencer par celle des plus pauvres et des plus nécessiteux ?
Dans
l’immense foule qui a battu le pavé pour le climat à Berne le 28 septembre
dernier, j’ai aperçu quelques pancartes signalant la présence des Eglises. Mais
ils étaient certainement bien plus nombreux, les chrétiennes et les chrétiens
qui manifestaient de manière plus discrète, au nom de leur solidarité humaine
d’abord, mais aussi avec leurs motivations évangéliques.
Et
quelles peuvent être ces motivations spécifiques ? Incontestablement une
certaine vision de l’homme, comme personne sacrée, imbriquée dans ses relations
sociales avec tous. Depuis la venue du Fils de Dieu en notre chair, nous savons
mieux que tout ce qui concerne l’humain implique aussi le divin, et que la
vocation transcendante de l’homme l’enracine d’autant plus dans les exigences
de la fraternité universelle.
Sans
doute, au milieu des manifestations populaires et des débats
« terrestres », le chrétien doit-il garder une précieuse liberté
critique, ne serait-ce que pour remettre en question certains comportements qui
sentiraient le mépris ou conduiraient à la violence. Mais pour tout le reste,
ce qui est humain et qui a de l’avenir, comment ne pas témoigner du Christ, le
meilleur ami de l’Homme, en étant au milieu des hommes, en partageant leurs
peines et surtout leurs espérances, en luttant pour une « écologie humaine
intégrale ».
Dans
cet esprit/Esprit, je vous/nous souhaite une bonne année 2020.
A paru sur le site www.cath.ch Claude
Ducarroz
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