lundi 26 décembre 2011

Homélie 4ème dim. Avent

Quatrième dimanche de l’Avent
18 décembre 2011

Il y a des rendez-vous qu’on ne peut manquer. Par exemple, à l’approche de Noël, le rendez-vous avec Marie, la mère de Jésus. Car au cours de la nuit de Noël, que virent donc les bergers ? « Ils découvrirent Marie avec le nouveau-né ». Ils sont donc inséparables.
L’Eglise aujourd’hui nous propose de remonter, une fois de plus, au commencement. Attention ! le voyage est insolite, et même parfois déconcertant, typiquement à la manière du Dieu des surprises.
N’allons pas à Jérusalem, la grande ville royale. Non. Prenons la route d’une petite bourgade de Galilée, dont on disait alors que rien de bon ne pouvait sortir d’elle.
Et là, entrons dans une modeste demeure, comme les autres. Une jeune fille habite ici. Elle est belle sans doute, car elle est jeune. Mais attention : déjà promise en mariage à un homme du même village, Joseph l’artisan charpentier. Pas de quoi en faire toute une histoire, me direz-vous.

Et soudain, c’est le coup de foudre, le coup de foudre de Dieu pour notre humanité, l’irruption du divin amoureux dans notre condition de misère. Un messager de Dieu entre, non sans surprendre la jeune fille qui est l’objet de la grâce divine. « Je te salue, comblée de grâces… » Marie ne s’attendait pas à une telle déclaration d’amour. Elle en est toute bouleversée, mais sans perdre son sang froid. Car elle demeure assez lucide pour poser des questions, intelligentes même.
Heureusement, le Dieu qui l’étonne jusque dans ses profondeurs de femme n’est pas du genre violent. Au contraire, il est tout en délicatesse, en respect. Le projet d’alliance de Dieu avec l’humanité doit se nouer en elle, tel est le souhait de Dieu sollicitant sa liberté. Oui, Dieu veut devenir plus qu’une parole dans son esprit, mieux qu’un bon sentiment dans son cœur. Dieu veut se faire quelqu’un jusque dans sa chair de femme afin d’être parmi nous, pour la première et dernière fois, l’un de nous, comme nous, au milieu de nous, pour nous. « Voici que tu vas concevoir et enfanter un fils. »

Et ensuite, tout explose dans le mystère. Car c’est la puissance de l’Esprit-Saint qui la prendra sous son ombre ». Et que sera cet enfant, fils de sa chair et pourtant pas tout à fait comme les autres ? « Il sera le Fils du Très-Haut, oui, le Fils de Dieu. »
Marie aurait pu s’effondrer devant des annonces et des promesses si déconcertantes, qui la conduisent à l’orée du mystère même de Dieu, bien au-delà des espérances d’Israël qu’elle partageait sans doute dans sa foi simple et profonde. Mais elle reste debout dans sa dignité, avec toute sa personnalité de femme et de croyante : « Comment ? je suis vierge ». Admirable réalisme d’une fille du peuple qui sait ce qu’elle est et veut aussi comprendre, autant que possible, même avec un ange, même avec Dieu.
Alors l’ange lui donne un signe, encore tout féminin. Sa cousine Elisabeth est enceinte, elle aussi, mais dans sa vieillesse, elle la femme qu’on appelait stérile. Alors la conclusion s’impose : « Rien n’est impossible à Dieu ».

Maintenant Marie s’incline, pas comme une vaincue par la religion, pas comme une humiliée par son Dieu, mais comme une petite servante invitée délicatement à l’extrême confiance, parce que ce Dieu-là est Amour. Un souffle de Dieu l’a effleurée en la touchant comme une subtile respiration d’en-haut. Dieu lui fait un cadeau dont elle ne mesure sans doute pas encore qu’il va changer le cours de l’histoire universelle, sauver toute l’humanité, bouleverser le cosmos, renouveler la face de la terre et des cieux.
Elle est là, toute petite devant une si grande nouvelle, émue par son Dieu qui l’interpelle et l’inspire. Elle lâche prise dans un immense abandon par liberté, ce qu’on appelle la foi : « Je suis la servante du Seigneur ; que tout se passe pour moi selon ta parole. »

Et commence en elle une vie inédite ; elle est comblée par une nouvelle présence, charnelle et spirituelle à la fois ; elle est la mère du Seigneur, elle est la maman de Jésus, le Sauveur du monde. « Car le Verbe s’est fait chair, et il a habité parmi nous ». Chair en elle d’abord, en croissance durant neuf mois, parce qu’il voulut naître d’une femme. Parmi nous, parce qu’il est venu pour nous, de Noël à Pâques, en passant par la croix. Et depuis ce jour-là, à Nazareth de Galilée, grâce à la féminine collaboration de Marie, la petite servante du Seigneur, Jésus demeure chaque jour avec nous, comme il nous l’a promis, jusqu’à la fin des temps.

C’est la messe. Nous allons communier. Certains parmi vous ne savent pas ce qu’est l’eucharistie…ou l’ont peut-être oublié. Je pense aussi à vous qui souvent ne pouvez pas communier parce que vous êtes malades, handicapés, âgés, mais qui espérez sûrement recevoir la communion à l’occasion de Noël, peut-être grâce à un ou une ministre laïc.
Communier, c’est participer au mystère de l’annonciation, de l’incarnation. C’est accueillir le Christ, y compris avec son corps emmailloté de pain, dans notre vie béante, telle qu’elle est, avec ses ombres et ses lumières. Si Marie fut le premier tabernacle du Verbe incarné, nous pouvons devenir des réceptacles de celui qui est à la fois le fils de Marie et le fils de Dieu. Prenez, mangez…
Le corps à corps eucharistique est une merveilleuse communion d’amour. Un peu comme Marie. L’eucharistie, la messe : c’est Noël tous les jours.

Claude Ducarroz

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