mardi 23 janvier 2018

Je suis énervé

Ils m’énervent…

Oui, ils m’énervent, tous ces Suisses –mes chers compatriotes !- qui prennent prétexte de ses imperfections pour dauber sur l’Union européenne. Parce qu’elle traverse quelques difficultés, ils font tout pour empêcher un quelconque rapprochement de la Suisse avec la Communauté de nos voisins et nous promettent les pires malheurs dans l’hypothèse –fort improbable d’ailleurs- où nous aurions quelque velléité de faire partie du club.

Évidemment, on peut ausculter cette Union avec la petite lorgnette des intérêts purement économiques. Les Suisses foncent sur leur calculette et estiment « de leur intérêt » de rester en dehors, tout en slalomant pour tirer quelques avantages d’une tiède fréquentation…de loin.  C’est oublier que, malgré sa marche parfois fort boiteuse, l’Union européenne est d’abord une communauté historique de destin, au service de la paix dans notre continent. Cette paix qui nous a fait si souvent défaut dans les horreurs et terreurs des guerres, cette paix sans laquelle notre civilisation de liberté et de prospérité ne pourrait même pas exister.

On ne peut juger sereinement de l’Union européenne si l’on commence à la dénigrer à la faveur d’une méchante amnésie. Mes ancêtres ont tous subi les conséquences des guerres européennes, certes à la manière suisse, autrement dit beaucoup moins cruellement que nos voisins. N’empêche : mon arrière-grand-père a traversé la guerre de 70, mon grand-père celle de 14 et mon père celle de 39. Et moi, je suis né au début de la dernière guerre, avec toutes les atrocités qui suivirent. Quand je visite Auschwitz, je ne peux oublier que ceux-là et moi, nous sommes contemporains. Triste bilan : une guerre par génération !

Depuis lors, notre continent est devenu une vaste zone de paix durable. Ceux qui ont voulu repasser le sinistre plat des conflits armés –par exemple dans les Balkans- ont dû rentrer dans leurs casernes. Maintenant, toutes ces nations cherchent à entrer dans l’Union européenne. Elles ont compris qu’il y avait là à la fois la garantie de la paix et le gage de la prospérité.

Par je ne sais quelle grâce, et certainement aussi par les lourds sacrifices des autres peuples autour de nous, les Suisses ont échappé au pire depuis plusieurs siècles. La moindre des reconnaissances serait qu’ils se souviennent de ce qu’ils doivent aussi à leurs voisins, en plus de leurs propres engagements évidemment.

Toute construction politique demeure fragile. Ceux qui ont imaginé la nouvelle Europe en prophètes -parmi lesquels de nombreux chrétiens- , ceux qui l’animent encore en valeureux pionniers, méritent mieux que les moues parfois sarcastiques de certains Suisses.

Certes, personne ne nous oblige de « faire partie » du club. Mais du moins cette belle utopie de paix et de fraternité –malgré toutes ses imperfections- postule de notre part au minimum une estime reconnaissante, au mieux une collaboration sincère, fût-elle latérale.
Depuis plus de 70 ans, nous vivons en paix sur notre Europe, fière à juste titre de sa civilisation multicolore, ancrée dans le respect des droits humains et dans l’idéal d’une liberté couplée à la solidarité.

De grâce –car c’en est une-, soutenons les apôtres d’une solide Union européenne pour assurer un avenir encore meilleur à notre chère Europe, notre commune patrie.

Claude Ducarroz

A lire sur le site www.cath.ch



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