Dédicace de la cathédrale
C’était exactement le 6 août 1182, sous le règne de Rodolphe de Habsbourg. L’évêque de Lausanne s’appelait Roger de Vico Pisano. C’est lui qui est venu à Fribourg consacrer la première église de cette ville fondée par le duc Berthold IV en 1157. Elle était déjà dédiée à St-Nicolas de Myre, un saint très populaire en Europe depuis que les marins de Bari, en 1087, avaient transféré ses reliques en Occident pour les soustraire aux invasions musulmanes.
Que de chemin parcouru depuis lors !
Un siècle plus tard, à savoir en 1283, on commença la construction d’une nouvelle église, plus grande et de style gothique, pour l’essentiel, celle que nous admirons aujourd’hui. Mais il faut relever que chaque siècle a laissé les traces d’adjonctions et d’embellissements. La tour actuelle, devenue le symbole même de notre bonne ville, n’a été terminée qu’en 1490.
A la suite des guerres de Bourgogne, Fribourg est devenu canton suisse en 1481, et l’église de St-Nicolas le centre de ralliement des nouveaux confédérés, pour la première fois avec des citoyens de langue française.
On ne pouvait pas en rester là puisque l’église de notre voisine de Berne avait obtenu de devenir collégiale, avec un chapitre de chanoines en 1484. C’est pourquoi les autorités civiles ont demandé le même honneur pour Fribourg, ce qui fut accordé par le pape Jules II le 20 décembre 1512. Même si actuellement le prévôt a renoncé à la crosse et à la mitre, attendez-vous à quelques belles célébrations de commémoration en 2012 pour fêter les 500 ans de notre chapitre de chanoines.
Comme vous le savez sans doute, c’est en 1924 seulement, après plusieurs siècles de négociations, que la collégiale de St-Nicolas est devenue cathédrale pour offrir –enfin !- une église digne de ce nom à l’évêque de Lausanne et Genève, privé de cathédrale depuis la Réforme du début du 16ème siècle.
Tout ça, c’est pour le sanctuaire, le bâtiment, les murs, si beaux qu’ils soient, comme ne cessent de le découvrir les milliers de visiteurs qui viennent, chaque année, admirer notre cathédrale, avec ses multiples trésors d’art et témoignages de piété. Car il faut que notre chère cathédrale demeure le temple de Dieu, la maison de l’Eglise, un lieu ouvert à tous, certes, mais d’abord un espace de prière et de liturgie qui rassemble et nourrisse le peuple de Dieu.
Pour le rassemblement autour de la parole et de l’eucharistie –sauf aux grandes circonstances- il faut bien le constater, actuellement nous ne sommes plus tellement nombreux. C’est une souffrance, un souci, une tristesse.
C’est là que l’apôtre Paul a encore quelque chose à nous dire. Quand il écrivait aux quelques chrétiens qu’il avait guidés vers la foi dans la grande ville païenne de Corinthe, ceux-ci n’avaient même pas d’église, encore moins une cathédrale. Encore très peu nombreux, rejetés par les juifs et moqués par les païens –en attendant de véritables persécutions-, ils se réunissaient dans leurs maisons, comme il est dit dans les Actes des Apôtres. « Ils étaient assidus à l’enseignement des apôtres, fidèles à la communion fraternelle, à la fraction du pain et aux prières. Tous les croyants mettaient tout en commun. Ils rompaient le pain dans leurs maisons, prenant leur nourriture avec joie et simplicité de cœur. Ils louaient Dieu et avaient la faveur de tout le peuple. Et chaque jour, le Seigneur adjoignait à la communauté ceux qui seraient sauvés » (Ac 2,42-47).
La leçon est claire, et toujours plus d’actualité. Nous aimons notre cathédrale, nous la soignons, nous l’admirons, nous lui disons « bon anniversaire » en ce jour de commémoration de sa consécration. Mais nous savons que l’église –avec petit e- est là pour abriter l’Eglise avec grand E-, la seconde étant de loin la plus importante puisque, en cas de nécessité, elle peut même subsister en se passant de la première.
Donc l’Eglise, c’est nous, la communauté faite de pierres vivantes. « Vous êtes la maison que Dieu construit », rappelait St Paul aux Corinthiens, qui ajoutait : « Vous êtes le temple de Dieu puisque l’Esprit de Dieu habite en vous. Oui, le temple de Dieu est sacré et ce temple, c’est vous. »
Une église - a fortiori une cathédrale- est un important signe d’Eglise dans une cité. La nôtre domine tous les autres bâtiments, comme un doigt levé très haut vers le ciel. Mais c’est à nous, l’Eglise des croyants, de faire signe dans la société qui nous entoure par notre manière de vivre en témoignant pour l’Evangile du Christ.
Nous ne faisons plus « nombre », nous sommes devenus un petit troupeau. Mais nous sommes bâtis sur une fondation solide qui s’appelle le Christ lui-même, avec le travail des architectes que sont les apôtres et tous ceux qui, après eux et comme eux, s’engagent pour rendre vivantes nos communautés, même si elles sont plus petites aujourd’hui.
Ils étaient douze au départ, avec Marie et quelques disciples rescapés de la grande épreuve de la passion et de la mort du Christ. Parmi eux, comme aujourd’hui d’ailleurs, surtout des femmes.
Ils ont misé sur le Christ vivant, ils se sont cramponnés à la foi pascale au milieu des contradictions et même des persécutions. Ils ont donné l’exemple de communautés unies et chaleureuses, au point que les autres disaient : « Voyez comme ils s’aiment ». L’amour, voilà le plus beau signe que nous puissions montrer, avec la ferveur d’une foi qui prie, dans ou hors des églises, pour donner ou redonner à notre monde le goût de chercher d’abord le Royaume de Dieu.
Vous le savez sans doute. Bientôt, à savoir le week-end du prochain Jeûne fédéral, tous les chrétiens de Fribourg, de manière œcuménique, veulent donner un signe fort au cœur de notre ville. C’est FestiBible, une fête autour de la parole de Dieu, qui voudrait la faire désirer et connaître au-delà de nos cercles habituels. Je suis sûr que vous serez de la fête en entraînant d’autres avec vous. Nous aimerions tellement que puisse se réaliser, aujourd’hui encore, ce que l’évangile de ce jour rapporte : « Quand il se releva d’entre les morts, ses disciples se rappelèrent ce qu’il avait dit. Ils crurent aux prophéties de l’Ecriture et à la parole de Jésus. »
« Sois sans crainte, petit troupeau, disait Jésus, car il a plu à votre Père de vous donner le Royaume. » A nous et à beaucoup d’autres. Ensemble, on essayera de le leur dire et de le leur faire goûter.
Claude Ducarroz
samedi 28 août 2010
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