Immaculée Conception 2009
C’est à la fois très simple et très compliqué. Et dans ce cas-là, généralement, on préfère ne rien dire. Et pourtant, une fois de plus, je dois prononcer une homélie pour la fête de l’Immaculée Conception de Marie.
« Nous déclarons, prononçons et définissons que la doctrine qui tient que la bienheureuse Vierge Marie a été, au premier instant de sa conception, par une grâce et une faveur singulière du Dieu tout-puissant, en vue des mérites de Jésus-Christ, Sauveur du genre humain, préservée intacte de toute souillure du péché originel, est une doctrine révélée de Dieu et qu’elle doit être crue fermement et constamment par tous les fidèles. »
C’est ainsi que le pape Pie IX, le 8 décembre 1854, sans avoir convoqué un concile, a proclamé le dogme de l’Immaculée Conception de Marie.
J’espère que vous avez tous tout compris et que vous êtes d’accord.
Mais peut-être qu’on peut dire ces choses plus simplement, comme l’affirment les chrétiens d’Orient.
Marie est la toute sainte, depuis toujours, parce que Jésus s’est préparée une mère digne de lui. Mais il faut aussitôt ajouter : pas en en faisant une automate du oui programmé d’avance, comme si la sainteté ôtait ou diminuait notre liberté. Bien au contraire, c’est le manque de sainteté, c’est le péché qui enchaîne ou altère notre liberté. C’est pourquoi, dans le récit de l’Annonciation, on voit très bien comment Dieu sollicite avec délicatesse et respect la liberté de Marie de Nazareth.
Un messager la salue comme « Comblée de grâce », mais cette dignité plonge Marie dans l’étonnement et suscite en elle bien des questions, d’ailleurs très réalistes :
« Comment cela va-t-il se faire puisque je suis vierge ? » Elle a droit ensuite à des explications qui, tout en l’introduisant dans un profond mystère, l’éclaire à l’aide d’allusions à la révélation biblique qu’elle connaît bien: « Le fils du Très-Haut, le trône de David, la maison de Jacob, la puissance de l’Esprit qui couvre de son ombre» : tout cela évoque en elle des images et des promesses dont elle a certainement entendu parler. Dieu instruit une femme intelligente, toute petite servante qu’elle est. Et de plus il lui donne un signe supplémentaire, très concret dans la vie d’une femme : la grossesse de sa cousine Elisabeth, malgré sa vieillesse.
Quand Dieu désire sauver le monde en envoyant son Fils dans notre chair, il propose à une femme de collaborer comme une partenaire dans une libre alliance. Il ne contraint pas. L’annonciation est une invitation, non une imposition. C’est pourquoi Marie peut finalement adhérer en disant très simplement et surtout librement, mais en toute vérité : « Je suis la servante du Seigneur ; que tout se passe pour moi selon ta parole. »
Et commence pour elle une route de sainteté pleine de surprises et même d’épreuves, de la crèche à la croix, en passant par la fugue de Jésus à Jérusalem quand elle ne comprit pas ce qui leur arrivait, à Joseph et à elle-même. La sainteté est toujours une aventure de foi avant de devenir une éclosion de joie.
Le pape Pie IX a parlé de l’immaculée conception de Marie comme d’une faveur singulière. Il s’agit, en effet, d’un privilège unique. Aucun de nous n’a reçu cette grâce dès son origine, que je sache. Encore que la lecture de l’épître aux Ephésiens doive sinon nous consoler du moins nous encourager.
L’apôtre s’adresse à des gens comme nous, ces quelques chrétiens perdus dans une grande ville païenne, creuset de toutes les religions et aussi repère de tous les vices. Et il leur fait une révélation stupéfiante, qui vaut aussi pour nous :
* dans son amour infini, Dieu nous a comblés de sa bénédiction spirituelle dans le Christ ;
* nous avons été choisis dès avant la création du monde pour être saints dans l’amour sous son regard ;
* il nous a destinés à devenir ses filles et ses fils à l’image de Jésus, et tout cela pour que soit chantée la merveille de ce don gratuit qu’il nous a fait dans le Bien-Aimé ;
* et nous voilà son peuple, sa famille, à la louange de sa gloire.
Rien que ça !
Quand l’apôtre écrit cela aux Ephésiens, il ne pense pas à Marie, mais à nous. Peut-être avons-nous de la peine à y croire parce que nous nous trouvons imparfaits et même, comme on dit, de pauvres pécheurs. Mais ces dons de Dieu restent valables, nous sommes intégrés dans son projet d’amour, nous participons -imparfaitement certes mais réellement- au mystère que Marie a accueilli intégralement et vécu parfaitement. Il n’y a pas des chrétiens de première classe et les autres, loin derrière. Il n’y a qu’un seul dessein de salut qui passe par le Christ, et nous en faisons partie. En avons-nous conscience ?
Qu’est-ce que ça signifie concrètement ?
* que nous sommes d’abord aimés d’un amour éternel, avant même d’exister en ce monde;
* que nous sommes accompagnés du même amour qui sans cesse frappe à la porte de notre liberté, sans jamais se décourager, car il n’est jamais trop tard pour Dieu …et pour nous;
* que nous sommes destinés à miser sur l’amour dans tout ce que nous faisons, du moment que nous sommes les enfants de la tendresse de Dieu qui a pétri notre être avec le sang de son cœur ;
* que tôt ou tard, nous déboucherons dans l’océan de l’amour divin qui nous attire et nous attend, à moins que nous ayons préféré être malheureux tout seuls plutôt que d’être réjouis et épanouis par le soleil de la divine miséricorde.
Finalement la vie humaine est un pèlerinage de l’amour à l’amour, avec les détours des péchés mais aussi les retours des pardons reçus.
Voilà ce que Marie immaculée nous rappelle en ce jour, elle la toute sainte, mais tellement mère à l’égard de ses enfants en ascension plus ou moins pénible sur la route qui conduit au Royaume de son fils où nous la retrouverons.
Marie, toi la première en chemin, mais sur le même chemin que nous, donne-nous la main. Amen.
lundi 18 janvier 2010
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